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Critique de Retter


Malheureusement, et contrairement à des nombreux lecteurs, je n'ai pas apprécié ce roman.

Tout d'abord, il y a une série de petits défauts qui, mis ensemble, ôtent une bonne partie de l'attrait du livre. Ce n'est que mon opinion mais j'ai trouvé les personnages très lisses et l'écriture assez commune. de plus, l'enquête policière que l'on suit piétine... et, dès lors, il ne se passe pas grand chose. Quelques fausses pistes sont glissées dans l'histoire mais ne donnent pas suite à de nouveaux arcs narratifs susceptibles de créer un minimum de suspens. Un inspecteur lance un simple "Tiens mais l'explication pourrait être ceci", et puis, non, en fait, voilà...

Mais tout ceci n'est rien comparé à ce qui m'a vraiment laissé une sensation désagréable une fois le livre refermé : un monstrueux lot d'incohérences ! J'ai lu à de nombreuses reprises que la fin du livre est stupéfiante.
J'aurais adoré le ressentir comme ça, vraiment. J'aime beaucoup l'idée du "twist" final et s'il avait été bien rendu, j'aurais applaudi des deux mains car j'apprécie me faire avoir à la fin d'un roman, me rendant compte que mes théories étaient fausses.
Ce n'est absolument pas le cas avec ces "Nymphéas noirs". Pourquoi ? Simplement parce que la fin n'est pas possible. Je m'explique (si vous n'avez pas encore lu la fin, arrêtez la lecture de ma critique maintenant ;) ) :

***spoiler en vue***
*3*
*2*
*1*
Les trois personnages féminins sont donc une seule et même personne. L'enfant évolue autour de l'année 1935 environ, l'adulte environ 30 ans plus tard et la vieille en 2010. Bon. Oui... mais non. Plusieurs éléments écrits noir sur blanc rendent ce schéma impossible car ils situent les personnages dans le temps à une même époque. La liste est longue mais je citerai, en vrac...
* le simple fait qu'une date situe l'action en 2010 à chaque début de chapitre, mais ce n'est pas le plus grave, admettons que là on peut encore l'expliquer par le fait que la vieille se souvient des événements, même si je trouve déjà ça limite.
* Durant l'enquête, les inspecteurs évoquent la mort d'un enfant en 1935 et disent "Mais qu'est ce que la mort d'un gamin il y a 75 ans vient faire dans cette affaire?". Aucun doute n'est possible : les enquêteurs sont donc bel et bien en 2010, soit dans le présent, en train de mener l'enquête sur la mort de Morval. C'est écrit, ils se situent dans le temps eux-mêmes. Donc, comme l'un des enquêteurs vit une histoire d'amour avec Stéphanie (la version adulte du personnage féminin), celle-ci doit forcément vivre en 2010 aussi... Soit en même temps que son avatar octogénaire.
* Une interaction avec la femme de la victime, Patricia, confirme cette simultanéité : l'enquêteur va interroger la femme sur son défunt mari. Une fois qu'il sort, la vieille va lui apporter quelques révélations, suite auxquelles Patricia appelle un ancien flic pour faire une contre-enquête car l'enquêteur principal n'est pas objectif dans l'affaire. Cette même Patricia qui regardait s'éloigner la vieille en se demandant si elle "doit croire cette vieille folle". Donc, une fois encore, victime, vieille, enquêteurs et (de facto) Stéphanie sont à la même époque.
* Stéphanie et sa version gamine, censées être séparées par une trentaine d'années, interagissent carrément ensemble. La première est la prof de la seconde, nommées toutes les deux noir sur blanc tandis que Stéphanie demande à Fanette (la petiote) pourquoi elle est debout dans le fond de la classe. Stéphanie et Fanette se retrouvent donc, elles aussi, ramenées à la même époque...

Il y a encore bien d'autres exemples mais ceux-ci m'ont particulièrement marqué. Alors comment fait l'auteur pour essayer de nous faire passer ces insurmontables problèmes de cohérence ? Eh bien avec deux petites astuces dignes des plus grands prestidigitateurs textuels :
1- La vieille nous révèle à la fin que dans tout ce qu'elle nous raconte là, ses souvenirs sont embrouillés et qu'elle mélange un peu tout. Subtil. Ca me rappelle ces vieux romans où il y a plein d'éléments inexplicables et où tout est résolu à la page finale par un "...Et elle se réveilla. Tout ceci n'était qu'un rêve". Honnêtement, on est sur le même niveau d'astuce. D'autant plus que, embrouillée ou non, elle ne peut s'embrouiller que dans la partie qu'elle a vécue (et même comme ça, c'est déjà gros, parce que s'emmêler les pinceaux au point de croire qu'on a été sa propre prof, il faut le faire... pour ne citer qu'un exemple). Or certains passages qui permettent de situer les événements ne mettent en scène que les inspecteurs, des personnes interrogées ou des témoins. Comment des passages n'impliquant absolument pas le personnage de Stéphanie, sous aucune de ses trois formes, passages dont elle ne peut rien savoir, peuvent-ils être confus dans ses souvenirs ?
2- La gamine est surnommée Fanette (pour Stéphanie, d'accord, logique). Mais comment faire en sorte que le lecteur ne sache pas que tous les personnages qui entourent Fanette jeune et Stéphanie adulte sont les mêmes ? Eh bien en changeant leurs noms, pardi ! Car c'est tout à la fin que la gamine révèle "Je ne vous appellerai plus par ces noms de peintres que je vous ai donné". On comprend alors que tous les enfants portaient un surnom, que chacun utilisait religieusement sans jamais se nommer par son vrai nom pour ne pas gâcher la révélation. Comme c'est pratique...

En somme, je me répète, j'aurais adoré que cette révélation finale soit bien construite. Elle aurait pu être un vrai coup de maître. Mais en l'état, je trouve qu'il s'agit plus d'une forme d'escroquerie scénaristique invraisemblable. Avis qui n'engage que moi, bien sûr. Quand je vois l'accueil qu'a reçu le livre, je me dis que c'est peut-être moi qui ai raté quelque chose, finalement.
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