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Critique de LaBiblidOnee


Une lecture cul sec qui m'a fait l'effet d'un bon remontant !
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Rhaaa les amis, comme tous les ans, je me suis fait un Arno Camenish : ma petite douceur de l'hiver. Figurez-vous que cette fois, dans ce petit canton suisse, l'Helvezia va fermer ! Alors les habitués y passent leur dernier soir en causant de tout et de rien, nous offrant des conversations de bistrot mêlées comme d'habitude de patois local qui accentue le charme de l'exercice.
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Si vous cherchez un livre d'action avec un vrai scénario, orientez-vous vers autre chose. Mais si vous avez envie de vous glisser dans le ronronnement et l'ambiance d'un bar de village, dans des conversations improbables sans queue ni tête, dans les commérages de quartier, dans des portraits au vitriol et dans le récit de petits moments simples de la vie, les joies comme les deuils, alors vous êtes au bon endroit chez la Tante, future ex-tenancière de l'Helvezia depuis soixante ans.
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Soixante ans d'amitié, de guéguerres, de confidences et petits malheurs… Mais surtout, soixante ans de picole à fumer comme des pompiers, à répéter les petits gestes routiniers et rassurants du quotidien qui font une vie, des vies, mille vies. Ici, exit la loi Evain et le Dry January, on s'enfile des cafés goutte, des pintes et des schnaps, le tout avec le cigare, la pipe ou la cigarette aux lèves, on commente la pluie, les crues, et cette satané neige qui ne vient toujours pas, le soleil qui sans doute ne reviendra jamais non-plus, on tousse et on s'étouffe dans la fumée des autres, on vide les cendriers, on ressert les clients, on alpague le voisin de table et on ressasse les faits divers en se chicorant sur l'année exacte. On engueule Gion Baretta qui ne met son cornet de sourd que lorsqu'il parle, l'andouille, et se moque de l'Otto qui revient des toilettes par la porte d'entrée après être passé par la fenêtre car la poignée intérieure lui est restée dans les mains.
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On ramène la Grand-Mère somnambule dans son lit si elle débarque dans la grande salle - surtout ne dit pas son nom ça va la réveiller ! - on rembarre le Friseur qui, ce soir, refuse de boire et demande de l'eau - de l'eau ! pis quoi encore, ça rend malade c'est bien connu dit la Tante, qui par cette réplique me rappelle ma Grand-Mère à moi quand elle tenait son propre bistrot où j'ai passé une partie de mon enfance !
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« Qu'est-ce que tu crois si la vieille buvait de l'eau bénite, dit l'Otto, je te le dis, transparente comme le verre qu'elle serait. »
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Bref, un livre à ne pas lire vite pour connaître la fin de l'histoire - on la connaît et il n'y en a pas trop, d'histoire - mais un livre pour savourer des conversations entre amis, découvrir les anecdotes de chacun, bercés par cette langue si particulière que nous rendent l'auteur et le traducteur, qui ne rend certes pas la lecture facile, mais nous oblige à ralentir nous aussi, à prendre le rythme des vieux du village qui n'ont que ça à faire ou presque de se retrouver discuter ensemble… Avec cette épée de Damoclès au-dessus de nos têtes, accompagné d'un foutu déluge pour nous faire comprendre que c'est la fin du monde : qu'est-ce qu'on fera demain et les jours suivants, quand l'Helvezia sera fermé ?
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C'est sûr, plus qu'une chose à faire : noyer son chagrin dans l'alcool de poire de la Tante, en attendant que le Rhin déborde comme en 1985 - 1987 te dis-je !! -, lorsqu'il avait inondé ce bar et qu'on picolait assis à ces mêmes tables avec de l'eau jusqu'au genou !
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« On aurait pu chercher de l'or sous cette table, dit l'Otto, y serait sûrement resté quelques mâchoires avec des dents en or coincées dans la passoire, après que Dieu il avait lavé pareil les pentes et que l'eau avait déferlé sur le cimetière, quand le mur a fichu le camp, ça t'a droit soulevé la moitié des tombes, elles ont été emportées dans le bas du village. Ca la fortune que la Filomena avait dans la bouche, dit le Luis, j'en aurais bien eu besoin à l'époque, la moitié de mes veaux noyés dans la crue, que j'ai presque dû arrêter de faire paysan après. »
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Voilà, les 100 pages sont comme ça donc si vous aimez, lisez au coin du feu et vous m'en direz des nouvelles ! Un très bon moment en ce qui me concerne, un peu meilleur qu'avec « derrière la gare » puisqu'on retrouve ici l'ambiance et les anecdotes d'adultes, presque aussi bien qu'avec « la dernière neige ». Mon seul regret : il ne m'en reste plus qu'un à lire pour finir la série. Dites, Monsieur Camenisch, un autre d'ici l'année prochaine ?! Siouplaiiiiiiiit !!!
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Hors du temps ; Truculent.
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