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Critique de Cer45Rt


Ce n'est pas sans appréhension que j'ai débuté la lecture de L'étranger ; je craignais le style. Eh bien, non, ce n'est pas du tout comme je le craignais ; le style n'est pas morne, ne laissant pénétrer aucune émotion. Bien au contraire. Avec ces élans lyriques, sa manière simple d'énoncer le vrai, combien brutal fut-il, c'est un style qui renvoie énormément d'émotion, que nous donne Camus.
Et une histoire, tout, sauf innocente… Mersault, en apparence, est un homme des plus simples. Son style même ( car le style de Camus est aussi le style du narrateur ), simple, refusant l'interprétation des faits, n'est pas une simple façon de raconter et de donner un ton au récit ; non, c'est bien plus que cela ; ce style montre que Mersault refuse une quelconque interprétation. Mersault, c'est l'Homme des Faits, et c'est pour ça qu'il est en décalage avec la Societé. Il dira qu'il a tué quelqu'un, il dira comment est-ce qu'il l'a tué ; il ne dira pas, cependant : j'ai tué, mais il y a ceci, cela pour m'excuser. Car il veut simplement donner un fait. Sa mère est morte ? Il l'accepte comme un fait, mais il refuse d'en donner une interprétation, d'y attacher un sentiment. C'est son combat. Son combat pour la vérité, la simple vérité. Mais pourquoi combat-t-il pour cette cause ? La réalité, c'est que Mersault se révolte contre toutes les petitesses d'interprétation, contre tous les arrangements, qui permettent de se justifier. A la fin, Mersault se révolte contre le fait même d'avoir un espoir qui, il le sait, est illusoire. Il choisit d'accepter la mort, refusant les illusions et du même coup, acceptant les faits.
Et même dans ses élans, peut-être même plus que jamais dans ses élans, l'écriture se fait farouche et indomptable, comme son héros. Car elle exprime toujours la pensée de Mersault. Et c'est pour ça qu'elle n'est pas morne, et c'est pour ça qu'elle n'est pas sans vie : parce qu'elle est l'expression d'un cheminement, d'une vie. C'est pour ça qu'elle est farouche, indomptable, dans son calme, comme dans ses élans, comme dans ses passions. Elle est comme Mersault, car elle est Mersault. C'est rare, les narrateurs qui sont aussi proches de leur énoncé, tellement, tellement proches qu'ils se confondent avec leur façon d'énoncer, jusqu'à donner à un récit une force, une puissance, une humanité qui n'appartient qu'à lui.
Mais, aussi rares que ce soit, on peut sans nul doute trouver des écrivains, des auteurs exceptionnels qui l'ont faits. Des auteurs comme Camus.
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