AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Terre noire (13)

- Des rhombes?
- Oui, une sorte d'instrument très bruyant. Ils se sont peint le corps au charbon et les ont faits tourner jusqu'au village des femmes. Quand ils sont arrivés, elles n'ont pas supporté le bruit. Tu imagines, un rhombe fabriqué par Soleil? Il paraît que leur vrombissement faisait tomber les cheveux. Elles ont pris peur, abandonné leurs fûtes et ont couru se réfugier dans les maisons. Voilà comment les hommes ont volé les flûtes.
Nous nous sommes assises en silence, à observer le lent fumage du poisson.
- Mais les Hyper-Femmes ont encore des flûtes.. dit Kassuri, malicieuse.
- Les Hyper-Femmes?
Oui, grand-mère, raconte! demande Hayumi.
- Cette petite... elle est au moins aussi curieuse que toi, Ana! rit Padjá. Eh bien, c'était pendant l'initiation des garçons, les hommes avaient décidé d'aller pêcher pour les enfants. Plusieurs jours étaient passés et ils ne revenaient pas. Les femmes attendaient au village. N'en pouvant plus, l'une d'entre elles a demandé à son plus jeune fils d'aller voir ce qui se passait. Il est descendu jusqu'à la plage et a vu que les hommes se transformaient en pécaris, le cochon-bois. Des poils leur poussaient sur le corps et leurs dents étaient devenues énormes. Son père-pécari lui a donné du poisson. Il l'a caché dans sa fûte et l'a apporté à sa mère. En arrivant, il a raconté ce qu'il avait vu.
- Et après, et après? veut savoir Hayumi.
Les femmes ont cuisiné et partagé le poisson à la place des hommes, au centre du village, et ont dit: "Nos maris se transforment en monstres pendant qu'on les attend. Dansons et réjouissons-nous, car nous n en voulons plus."
- Et pendant qu'elles chantaient, elles se sont transformées en Hyper-Femmes, dit Kassuri.
- Oui. Leur clitoris, qu'elles ont fait mordre par des insectes, est devenu énorme, complète Padjá. Elles ont enfilé les coiffes, les boucles d'oreilles, les ceintures, les genouillères et les brassards des hommes. Dans la forêt, quand ils les ont entendues jouer de la flûte, les époux ont décidé de retourner au village. Mais, à leur arrivée, elles les ont attaqués avec des dents de tétra vampire.
Elles ont alors jeté leurs fils encore petits dans les ruisseaux. Ils se sont aussitôt transformés en poissons et elles n'ont gardé que leurs filles. Un jeune garçon s'en est sorti et a été transformé en tatou. Le garçon-tatou a creusé un tunnel sous la terre et les femmes l'ont suivi.
De temps en temps elles sortaient de terre et ensorcelaient d'autres femmes qui les rejoignaient. Elles se sont frottées avec l'écorce du péqui et leur corps s'est retrouvé couvert d'épines. Elles sont allées vivre dans un endroit rien qu’à elles, entouré d’eau de tous côtés.
Commenter  J’apprécie          00
Voici un extrait de la page 100 :
« …‚un vieux cahier d'écolier avec une couverture en papier marbré rose et marron. Ses lèvres tremblent : avant même de l'ouvrir, elle devine déjà les feuillets crème, rayés de fines lignes bleues, l'écriture légèrement inclinée vers la droite et les points sur les i éparpillés un peu partout.
Elle l'attrape comme un naufragé, pose son visage sur le cahier, enfonce son nez dans le papier poreux et inspire. Une odeur de vieux, presque de moisi, mais, derrière l'odeur des choses gardées, elle reconnaît l'odeur humide des choses venues de l'autre côté de l'océan, qui ont vécu dans la forêt, une odeur de paille et de fumée, de terre et de feuilles piétinées. Elle a envie de se lancer à la poursuite des mots passés, mais elle redoute l'impact, elle sait que le colis, malgré la bonne intention, est piégé. Alors elle fait comme si aucun volcan n’explosait en elle, comme si elle n'avait pas le visage en feu, comme si elle était sereine et calme, que son cœur ne battait pas la chamade et que ses mains n'étaient pas moites. »
Commenter  J’apprécie          00
Le voyage est long, très long. Ana convoque une dernière fois la sensation de fraîcheur de l’aéroport avec ses escalators magiques, ses chariots, ses voyageurs chargés, la confiserie chic et les flacons de médicaments, un monde tout blanc, clair, luisant, sur le point de disparaître ace à un autre, brun, poussiéreux, d’arbres tordus et de chemins à perte de vue. À mesure que le bus avance, un autre Brésil se dévoile. Un monde de petites villes perdues au cœur du Mato Grosso, d’exploitation de soja, de camionnettes, de crevasses et de chapeaux de cuir, tout à fait incompatible avec le monde scintillant des comptoirs de vente et du café expresso, d’hommes improbables en costume trois pièces flanqués d’attachés cases bien lustrés et de passe-droits. Ici une couche de terre recouvre tout. Le soleil passe sa langue dessus. Et la poussière colle un peu plus.
Commenter  J’apprécie          00





    Lecteurs (189) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Les classiques de la littérature sud-américaine

    Quel est l'écrivain colombien associé au "réalisme magique"

    Gabriel Garcia Marquez
    Luis Sepulveda
    Alvaro Mutis
    Santiago Gamboa

    10 questions
    377 lecteurs ont répondu
    Thèmes : littérature sud-américaine , latino-américain , amérique du sudCréer un quiz sur ce livre

    {* *}