AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Jean-Daniel


« La classe de neige » a obtenu le prix Femina en 1995, ce titre aux résonnances douces de souvenirs d'enfance pourrait laisser penser que nous sommes en présence d'un roman léger et joyeux, il n'en est rien.

Nicolas part en classe de neige avec sa classe. Il n'en a pas envie mais sa maîtresse a insisté, c'est l'occasion de se faire une place dans le groupe. Toutefois une appréhension, partagée par les parents qui redoutent un accident de car, amène le père à conduire Nicolas au lieu de résidence de la classe de neige. Malheureusement, Nicolas oublie son sac de voyage dans le coffre de la voiture de son père, il tombe malade, et commence à s'inquiéter de ne pas recevoir de nouvelles de celui-ci. En quelques lignes, le malaise est déjà bien présent, il ne fera que croitre. A partir de l'oubli de son sac, Nicolas voit son séjour à la montagne se transformer en véritable cauchemar.

Après un début presque banal, l'auteur installe une atmosphère lourde et oppressante ; une menace plane sur Nicolas et le lecteur est amené à se plonger dans l'angoissante imagination de Nicolas où le réel et l'imaginaire s'imbriquent pour ne faire qu'un. Le lecteur ignore d'où le danger va surgir, quel forme il va prendre, mais il devine que quelque chose est en marche. La classe de neige est un roman du non-dit qui est continuellement une source de tension. Certaines choses sont dites à demi-mots, d'autres sont sous-entendues. Tout au long du roman, Emmanuel Carrère donne des indices mais ne dévoile rien, il déstabilise le lecteur et le laisse imaginer et découvrir par lui-même. Ainsi, certaines révélations ne sont que suscitées et font appel à l'esprit de déduction du lecteur. Il y a un sentiment d'étouffement dans ce presque huis-clos que l'auteur nous impose pour créer un sentiment d'enfermement. Le malaise règne en maitre dans ce troublant roman où le père, absent du chalet, est pourtant omniprésent.

Emmanuel Carrère affiche une formidable efficacité en allant à l'essentiel par petites touches successives qui offrent des indices éclairant la situation et pour décrire des sentiments et la capacité des enfants à se raconter des histoires que chez les adultes on nommerait mythomanie. Le mythomane se ment à lui-même, confondant vérités et mensonges, réalité et fiction. C'est exactement ce qui arrive à Nicolas dont les hallucinations prédominent sur le réel qui ne semble plus avoir d'emprise sur lui. Ne sachant plus faire la distinction entre le réel et l'imaginaire, il devient victime de ses propres illusions, en partie pour se protéger.

Ainsi, pour échapper à une terrible réalité, en proie à des angoisses nées de son imagination, Nicolas prend ses rêves pour des réalités et se crée un univers dans lequel

La réalité va rattraper le jeune Nicolas avec la révélation finale d'une rare violence. La fin est rude et l'intrigue se termine sans que la vérité soit exprimée de façon explicite.

Emmanuel Carrère nous offre une nouvelle fois un excellent roman, écrit dans un style sobre et précis, où il décrit avec talent la psychologie d'un enfant peu sûr de lui et en recherche de reconnaissance.
Commenter  J’apprécie          867



Ont apprécié cette critique (51)voir plus




{* *}