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Critique de Enroute


A la fin du XIXème siècle, la précision des appareils mesurent des vitesses de la lumière qui ne sont plus en cohérence avec les notions de temps et d'espace présupposées par la physique galiléo-newtonienne.

Qu'à cela ne tienne : Einstein postule que l'invariant est la vitesse de la lumière... et tant pis pour l'espace et le temps.
En conséquence de la théorie de la relativité générale, la matière n'est plus qu'un ensemble de propriétés, la masse devient une accélération, la permanence de l'unité de l'objet disparaît derrière celle des lois qui en régissent le phénomène, le temps et l'espace ne sont plus que des coordonnées associées à un événement et perdent leur caractère absolu.

Ces changements ne sont pas sans interroger la notion de vérité : que devient la vérité de l'expérience humaine si le temps absolu et l'espace a priori que présuppose l'être humain ne sont que des variables et que les constantes, la gravité et la relativité, sont inaccessibles à ses sens ?

Rassurons-nous, la théorie de la relativité générale n'a aucune conséquence sur l'expérience quotidienne que nous faisons du temps, de l'espace et de la matière. Pour la physique en revanche, il faut mettre au placard les notions d'éther, de temps absolu et arrêter de penser que la géométrie est un modèle parfait pour la représentation spatiale.

En philosophie, les sceptiques penseront toujours que tout est bidon puisque les sens perçoivent autre chose que des lumières courbes, mais il est possible de leur opposer que le doute sur la notion de réalité ne date pas d'hier et qu'il faut peut-être commencer à envisager une régulation de l'évidence de l'illusion des sens par un cadrage réflexif. Il est possible de compléter la démonstration en ajoutant que la relativité générale n'enseigne pas qu'il n'existe que des vérités particulières mais que la vérité consiste en la mise au point de principes qui réalisent la meilleure cohérence valable pour la coordination de tous les systèmes de description de la réalité. Si la théorie évoque la relativité, la vérité, elle, reste universelle.

Malgré tout, si les conclusions sur la physique étonnent, il est possible d'en voir une anticipation dans la philosophie de Kant, qui avait indiqué, déjà, que temps et espace n'étaient pas des absolus, que l'on n'obtient comme résultats que ce que l'on veut mesurer et que la réalité n'est jamais qu'humaine. La vérité n'est jamais que l'amélioration de la cohérence du système global de modélisation de notre environnement depuis notre point de vue qui lui, reste humain : la vérité absolue n'est pas pour demain, mais le temps avançant, l'histoire de la science, qui est l'histoire des principes de vérité, finira bien par y mener, bien que la réalité, elle, reste humaine. Tout ceci donne pas mal de travail à la philosophie (et à la littérature ?).

L'écriture de Cassirer entraîne dans de grandes phrases qui stimulent l'intuition et font voir ce que l'on veut savoir. Très plaisant à lire, malgré les irruptions intempestives de Kant.
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