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Critique de Wyoming


Antonia est une héroïne magnifiée dans ce splendide roman que les mots de Willa Cather mettent dans la narration réalisée par un autre héros du livre, Jim. L'histoire s'étend sur plus d'une trentaine d'années, débutant dans l'enfance et l'adolescence des deux protagonistes jusqu'à leur quarantaine.

C'est la première partie qui est la plus développée avec l'arrivée des deux jeunes dans le Nebraska : Antonia immigrée tchèque avec sa famille, Jim jeune orphelin venant vivre chez ses grands-parents.

Dès le début, le lecteur est saisi par leurs personnalités. Est-ce celle de Jim qui s'affirme le plus? Pour certains, peut-être car c'est bien lui seul qui raconte cette immense tranche de vie en la peuplant de ses analyses, sentiments, rêves, illusions, rencontres diverses. Mais, c'est lui aussi, en présentant Antonia, en la décrivant depuis l'enfance jusqu'à l'âge mûr, en faisant référence à sa présence indispensable pour lui, même lorsqu'ils éloignés l'un de l'autre, quelquefois pour des années, en l'admirant, en l'aimant finalement, les deux se réunissant dans une amitié indissoluble qui lie leurs parcours respectifs, c'est lui qui lui confère son titre d'héroïne de ce très beau roman.

Les saisons et les années s'écoulent, Willa Cather les observant par les yeux de Jim et traduisant dans une écriture poétique toutes les beautés de la nature au fil du temps. L'hiver pèse lourd pour les jeunes héros, ils attendent un printemps tellement long à venir qu'ils ne manquent pas d'admirer les beautés et douleurs hivernales, à travers la campagne figée du Nebraska, les ornières gelées, les lacs engloutis sous la neige s'accumulant sur l'épaisseur de la glace qui les enserre. Mais, dès le printemps, ce sont les milliers de fleurs explosant dans la nature qui sont déployées dans le roman, ajoutant encore à toute sa dimension poétique tant les descriptions sont soignées et parfaitement évocatrice de l'environnement des deux jeunes. L'été et l'automne, saisons des fruits, des récoltes, du maïs cultivé en tant que nourriture essentielle pour hommes et bêtes, développent encore la richesse de l'écriture de Willa Cather.

D'autres jeunes filles apportent les aspects de leurs personnalités au roman, particulièrement Lena, la frivole lucide, devenue riche, dont Jim développe longuement les traits, partage avec elle une intimité diffuse, la présence ou l'absence d'Antonia demeurant au coeur de toutes leurs relations.

Et puis, il y a les plus anciens qui ne sont pas des figurants, qu'il s'agisse des parents d'Antonia ou des grands-parents de Jim. Les deux figures de proue sont le père d'Antonia, immigré malgré lui dans un pays où sa femme croyait trouver la fortune, le dépossédant de ses racines tchèques. Il est l'homme bon, celui qu'Antonia aima par-dessus tout, qui ne sera jamais oublié, et que Jim reconnaît aussi comme le père par excellence, l'homme honnête qui sait distinguer le bien du mal. La grand-mère de Jim est une grande dame, généreuse, capable de se déposséder de certains biens pour les donner aux plus pauvres, la famille d'Antonia en l'occurence, même si la mère, elle, ne cherche que profit et dissension.

"Mon Antonia", c'est le cri d'adieu du père à sa fille aînée, c'est aussi celui de Jim qui reconnaît en elle, dès l'enfance, la femme à aimer, à préserver et il l'aide de son mieux dans les difficultés si nombreuses qu'elle rencontre dans sa jeunesse.

La relation de Jim et d'Antonia est une vraie relation d'amitié et d'amour au sens le plus noble du terme, d'admiration réciproque, de besoin de se retrouver, de partager leurs univers et, en ce sens, les dernières pages du roman sont vraiment magnifiques et doivent se savourer lentement car elles reflètent l'essence de la relation de Jim et d'Antonia, cette possession du passé qui les unit pour toujours.
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