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Critique de marina53


Pour un maigre larcin, Jules Bonneau, à 13 ans, intègre, en mai 1927, la Colonie pénitentiaire maritime et agricole de Haute-Boulogne, à Belle-Île-en-Mer. Une situation qui accommode ses grands-parents qui ont peu faire de lui et de son père qui n'a jamais réussi à l'élever depuis que sa mère l'a abandonné. le voilà enfermé sur cette île, au moins jusqu'à sa majorité, trimant tout le jour à la corderie, quand d'autres s'échinent aux ateliers de timonerie ou de voilerie ou dans les champs, devant supporter les coups, les humiliations et les punitions des gaffes, les maigres rations alimentaires, les règlements de compte entre détenus. Si, parmi ces détenus, certains étaient de vrais délinquants, beaucoup se retrouvaient ici seulement pour de petits vols ou parce qu'ils étaient orphelins, vagabonds ou abandonnés de l'Assistance Publique. Et si certains ont tenté de s'enfuir, ils ont bien vite été rattrapés. Jules, lui, en cet été 1934, ne perd pas espoir de quitter cette île...

C'est en 1880 que fut construit la maison d'éducation surveillée de Belle-Île-en-Mer, au large de Quiberon. Un mot pompeux et plutôt inapproprié pour désigner tout simplement cette Colonie pénitentiaire, ce bagne pour enfants. Des enfants soumis à de durs labeurs, quel que soit le temps, et à de mauvais traitements. Seule distraction : la fanfare qui parade dans les rues de Palais. le 27 août 1934, un colon commence à manger son gruyère avant de boire sa soupe. Sacrilège pour les gaffes ! À partir de là, c'est la cohue, l'affolement, les cris, les ruades... 56 enfants s'échappent. Toute l'île se met à leur recherche. À partir de ce tragique fait divers, Sorj Chalandon imagine que l'un d'entre eux, Jules Bonneau, surnommé La Teigne, échappe aux griffes des îliens et des gaffes. L'auteur se glisse alors dans la peau de ce personnage et relate ses conditions de (sur)vie au sein du centre, ses amitiés ou inimitiés, son fol espoir de pouvoir s'enfuir de l'île, cette nuit du mois d'août et ses années passées sur l'île. À travers ce récit, l'auteur nous plonge au coeur de cette vie insulaire où se côtoient aussi bien des âmes charitables ou courageuses que mesquines ou détestables. En arrière-plan, l'on devine la montée du fascisme et la résistance bretonne. de son personnage, plus vrai que nature, l'on ressent combien l'auteur y a mis de ses tripes, de sa rage et de ses blessures. Un personnage que l'on ne peut oublier, de même que Louise ou Ronan et cet invité-surprise, Jacques Prévert, qui écrira un poème sur ces enfants du bagne.
Un roman fort, à la fois sombre et lumineux, empreint de rédemption et de rage...

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