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Critique de isabellelemest


Quand il s'adresse à ses lecteurs, Sorj Chalandon fait preuve d'une grande sincérité et authenticité, il leur parle avec une émotion profonde, et se livre dans ce qu'il a de plus personnel. Ce qu'il dit, et la manière dont il le dit, sont très impressionnants.

Ne revenons pas sur le thème du roman, une fiction destinée par l'auteur à lui permettre de partager avec autrui une expérience terrible, celle de la découverte sans nom des charniers des camps palestiniens de Sabra et Chatila en septembre 1982.
L'intrigue repose sur la mission folle confiée au narrateur Georges, par son ami Samuel, le metteur en scène grec, qui se meurt d'un cancer : donner suite à son projet de monter "Antigone" d'Anouilh, un drame emblématique de la guerre et de la Résistance, à Beyrouth, en confiant les différents rôles à des acteurs appartenant aux diverses communautés, palestinienne, druze, chrétienne maronite, chiite, arménienne, etc. Georges, qui croyait que la violence, c'était son engagement physique dans l'extrême-gauche militante parisienne des années 70 et ses petits combats de rues avec les étudiants d'extrême-droite, découvre d'abord la guerre civile libanaise, les snipers, la mort, mais aussi la densité et la chaleur des sentiments manifestés par les acteurs du conflit. Puis vient la bascule entre la paix qu'il retrouve à Paris auprès de ses proches, et qui lui paraît si dérisoire, et la guerre qui l'attire et le fascine. Malgré l'attaque du Liban par Israël en juin 1982, il persiste dans ce projet infaisable, mais, après la découverte insoutenable des cadavres mutilés des camps palestiniens, il va à la rencontre de son destin, au bout du désespoir.

Un livre dont la tension dramatique va croissant depuis les années estudiantines et leur violence emphatique mais souvent gratuite, jusqu'à l'engagement total dans une guerre qui ne laisse personne intact, pas même ses simples témoins, engagés qu'ils sont dans des rapports humains fraternels avec les différentes parties en conflit. C'est l'histoire de la tristesse, de la souffrance, des larmes retenues, de la colère et de la rage devant des massacres barbares de civils désarmés, sans que jamais l'auteur ne juge ni ne condamne les acteurs de ce drame, qui pourtant l'a aussi détruit intimement. L'écriture, sobre et percutante, montre son efficacité au fil du roman, et on sort de cette lecture marqué par la douleur qui en émane.
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