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Critique de Oliv


[Cette critique ne concerne pas le premier tome pris séparément, mais l'ensemble de la série]

"Le sabre et l'épée" est une série en quatre tomes, pas tout à fait récente puisque ceux-ci sont parus entre 2006 et 2009. Alors que la bande dessinée semble se chercher à tout prix une sorte de "légitimité intellectuelle" au point de renier jusqu'à son nom pour adopter celui de "roman graphique", on a là un bel exemple de BD de pur divertissement, colorée, pleine d'action et d'aventures, qui s'attache à nous faire voyager dans le temps et l'espace au milieu de magnifiques paysages. Un seul terme suffira à définir précisément de quoi il est question ici : wuxia. Autrement dit, l'équivalent chinois de nos récits de cape et d'épée, un genre prolifique vieux de plusieurs siècles qui fait la part belle aux arts martiaux, avec des combats spectaculaires, à main nue ou à l'arme blanche, et où le surnaturel s'invite fréquemment.

Dans cette série, en plus de nombreux combats parfaitement chorégraphiés et défiant les lois de la physique, on trouve donc un jeune homme plein d'ardeur associé à un vieux maître sentencieux, un monastère à flanc de montagne où l'on enseigne les arts martiaux, des brigands "cachés dans les herbes", des créatures légendaires, de la magie... Autant d'éléments récurrents du wuxia. Et force est de constater que les auteurs, bien qu'Européens, ont parfaitement restitué l'essence de la littérature populaire chinoise. Ayant alterné la lecture des quatre tomes de "Le sabre et l'épée" avec les soixante-et-onze chapitres de ce roman-fleuve qu'est "Au bord de l'eau", j'ai relevé dans les répliques des personnages créés par David Chauvel de nombreux éléments de langage empruntés au chef-d'oeuvre de Shi Nai-an ; plus globalement l'esprit en est très semblable. Frustré d'avoir vu la prometteuse adaptation de "Au bord de l'eau" par Jean-David Morvan arrêtée au bout de deux tomes, j'ai eu plaisir à retrouver une ambiance que l'on rencontre assez souvent dans le cinéma asiatique distribué chez nous, mais beaucoup moins dans des oeuvres littéraires accessibles en français.

Ainsi les auteurs n'ont-ils pas cherché à occidentaliser leur propos, ce qui est appréciable... Mais l'une des conséquences de ce parti-pris est que des lecteurs connaissant mal la culture chinoise risquent de passer à côté de certaines choses. Par exemple, l'intervention de Guanyin (qui n'est d'ailleurs pas nommée) à la fin du dernier tome pourrait donner l'impression de n'être qu'un mauvais deus ex machina ; ce qui est limpide et cohérent pour un lecteur sinophile ne le sera pas pour tout le monde, et l'on pourra avoir du mal à comprendre comment et pourquoi cette divinité a changé du tout au tout le destin du jeune Wu Gang... En outre, il ne faut pas s'attendre à être ébahi par la richesse du scénario ou par la construction de l'intrigue. D'ailleurs le récit aurait sans doute pu tenir en deux tomes, ou en huit, en retranchant ou en ajoutant certaines péripéties... Mais cela n'a que peu d'importance car c'est le genre d'histoire où la destination compte bien moins que le voyage. Tout ceci pourrait néanmoins contribuer à expliquer pourquoi cette série, qui personnellement m'a offert tout ce que j'en espérais, semble n'avoir touché qu'un nombre modeste de lecteurs depuis sa parution.
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