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Critique de babel95


Je remercie les Pères Noël de Masse Critique de Babelio et des Editions Diateino qui ont déposé la BD Chief Bullshit Officer de Fix dans ma boîte à lettres.....

Fix se définit lui-même comme un illustrateur spécialisé dans le dessin humoristique autour du monde de l'entreprise. Et c'est bien ce monde que décrit Chief Bullshit Officer.
Une petite précision : Bullshit, en anglais, ce sont "les conneries", et dans le contexte de cette BD, tout un langage verbeux qui ne veut strictement rien dire. le Chief Bullshit Officer, terme construit comme Chief Executive Officer et Chief Happiness Officer, c'est un Responsable Général en "Bullshit", que je choisirais de traduire en français par : Directeur Général du Grand N'importe Quoi....., histoire d'en rajouter un peu dans le vide et le pompeux....

La couverture de la BD nous donne un aperçu de l'ouvrage : Léonce, le héros, responsable informatique, est en pleine téléconférence. le projecteur se dirige sur un manager en costume cravate, alors que sur un rayonnage figurent en bonnne place Kant, Proust et Hegel ainsi que des ouvrages de management.
Mais dans la pénombre on devine sans peine le bazar généralisé, la vaisselle qui s'entasse dans l'évier, les slips qui sèchent sur un fil, la guitare et le journal de Mickey, la poubelle qui déborde....
Dans ce monde de l'entreprise, comme chez Léonce, on montre ce qui fait bien, on cache la vérité, et l'ensemble de la BD suit ce fil conducteur.

Dans Chief Bullshit Officer Fix va développer plusieurs thèmes au fil des pages : le télétravail en plein essor après la pandémie, le langage incompréhensible qui se généralise en entreprise, le management désorganisé, l'intelligence artificielle et ses limites, et la place des femmes, bien à part, dans ce grand n'importe quoi généralisé.

Dans cette entreprise, les employés sont représentés sous forme de petits animaux, sauf les actionnaires, qui se trouvent dans une cave éclairée à la bougie, et ont la tête recouverte de cagoules ce qui leur assure l'anonymat....

J'ai déjà lu et relu Chief Bullshit Officer une bonne dizaine de fois. J'ai trouvé de nouvelles raisons de réfléchir, m'arrêter sur une vignette, rechercher dans l'organigramme qui était qui, sourire et rire quand une réflexion faisait mouche. J'ai bien aimé le thème du "bullshit", et du "Chief Bullshit Officer", en anglais, cela fait "riche", mais au final il est assez triste de se noyer dans un verbiage pompeux qui masque la réalité, rend les relations hiérarchiques assez floues, et ne permet pas d'avancer. le Chief Bullshit Officer a pour tâche de faire prendre les vessies pour des lanternes, dans le cas présent pour des licornes - ces start-up modèles - et chacun, dans le service, s'emploie à mettre de petits masques de licornes pour être dans le coup, en langage bullshit "être agile et totally customer centrics"...

Fix nous parle avec beaucoup de justesse du télétravail et de la place des femmes en entreprise, le télétravail qui connaît ses limites, avec les employés qui rêvent de retrouver la machine à café, les collègues râleurs...

Face au grand n'importe quoi, Fix nous montre des femmes, cadres ou jeunes recrues, lucides, qui s'interrogent et apportent raison et discernement dans ce monde loufoque, mais sont plus ou moins systématiquement rembarrées ou mises à l'écart d'un projet, non pas par manque de compétence - mais parce que ce jour-là, par exemple, Natacha était en télétravail et que la connexion était mauvaise. Ainsi, le Chef félicite Cunégonde pour le pilotage de son projet, dénigre les collègues masculins qui sont des branquignols et des feignasses - mais Cunégonde est moins bien payée et moins gradée, et Cunégonde finit par partir, tout en faisant l'objet de réflexion personnelle - "j'ai toujours dit qu'elle n'avait pas le niveau"...et que penser de la planche intitulée "l'homme est une femme comme les autres", dans laquelle le manager veut améliorer l'égalité femmes-hommes dans le service, a besoin de statistiques et demande (il faut oser le faire, quand même) : "Messieurs, combien d'entre vous sont des femmes ?"

Au final, une lecture qui se veut divertissante, critique d'un langage verbeux, le bullshit et de tous ceux qui l'emploient pour masquer leur manque de compétence, mais aussi une lecture plus critique d'un monde de l'entreprise dans lequel règne le "grand n'importe quoi", dans lequel les femmes ne sont toujours pas reconnues.

Pourquoi deux pages sont-elles consacrées à Noël, Joyeux Noël nous montre un enfant qui demande à son père "Il existe vraiment, le livreur Amazon ? "et La vérité sort de la bouche des enfants: "Papa, je crois que le père Noël est un algorithme...." le thème est bien loin de celui de la vie en entreprise, mais j'ai beaucoup aimé ces interrogations pas si naïves d'enfants qui seront de futurs employés avisés....

J'ai montré la BD à plusieurs proches à Noël, mais pas question de la prêter tant que la critique n'était pas prête ! Alors, maintenant Chief Bullshit Officer va pouvoir "partir en tournée", réjouir d'autres lecteurs et lectrices, qui se reconnaîtront, sans aucun doute, sous les traits des employés du service informatique managé par Léonce.

Je souhaite de bonnes Fêtes à tous les babéliotes, une belle année 2023, de belles lectures !
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