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Critique de nanouche


Mona Chollet est journaliste -au Monde diplomatique- un métier pour lequel on considère généralement qu'il faut aller sur le terrain pour faire du travail de valeur. Or Mona Chollet est casanière et entreprend avec Chez soi de réhabiliter le casanier et d'étudier son cadre de vie. En fait tout cela ne sera qu'un prétexte pour aborder de nombreux sujets.

Aujourd'hui le monde entier envahit notre espace privé par le moyen d'internet. Donc pas besoin de sortir, on peut faire du très bon travail en compilant et digérant des sources diverses. Elle nous présente sa pratique des réseaux sociaux et je dois dire que ça ne m'intéresse pas vraiment. C'est le premier reproche que j'ai à faire à cet ouvrage: Mona Chollet parle beaucoup d'elle et pas toujours de façon pertinente, il me semble.

L'ouvrage aborde ensuite tout ce qui nous empêche de jouir à loisir de notre foyer. Il est question des SDF et des mal logés. J'apprends qu'"au début des années 1980, les foyers consacraient 25 % de leurs revenus à l'alimentation et 13 % au logement ; trente ans plus tard, le rapport s'est inversé". Il y a une critique du travail qui ne laisse pas suffisamment de temps pour profiter de son chez soi ou qui n'en laisse pas la force quand il épuise, de toute façon qui aliène quand on en vient à considérer comme glorieux de n'avoir "pas une minute à soi". La solution, pour l'autrice, c'est le revenu de base.

Je suis intéressée aussi par les passages qui traitent des tâches ménagères et de celles et ceux qui les font: domestiques d'hier et d'aujourd'hui, femmes au foyer – avec un historique de l'invention de cette figure-, répartition des corvées à l'intérieur du couple.

"En 1973, au Royaume-Uni, le travail ménager était devenu un châtiment possible pour certains criminels. Un tribunal avait condamné l'un d'eux à nettoyer un foyer pour personnes âgées. Une journaliste avait alors porté à l'attention des juges le fait qu'à travers le pays des milliers de femmes étaient déjà "internées pour des durées plus ou moins longues" et exécutaient "cette nouvelle peine hautement dissuasive baptisée "ménage". Nombre d'entre elles "éprouvaient des difficultés croissantes à se rappeler de quel forfait elles s'étaient rendues coupables, au juste".

Mona Chollet pense qu'il n'est pas acceptable de payer des gens pour faire le ménage. Ils sont mal payés et trop souvent méprisés. Aussi chacun devrait faire son propre ménage, au travail ou à la maison. Cela entraînerait la disparition des maisons trop grandes ou des surfaces trop salissantes. Je ne sais pas si c'est vraiment possible dans tous les milieux de travail mais je trouve ses arguments convaincants. Il est de nouveau question du revenu de base. Elle propose aussi de se tourner vers de nouvelles façons d'habiter: habitat groupé ou colocation.

Il est finalement question d'architectes et d'architecture, un chapitre dont le contenu m'agace pour plusieurs raisons. D'abord parce que Mona Chollet n'est pas toujours objective. Par exemple, elle critique l'architecture post-moderne dont certains représentants se flattent de mettre les usagers mal à l'aise. Ainsi Peter Eisenma qui a placé dans une salle à manger une colonne destinée à frustrer la conversation autour de la table du dîner. Au contraire elle porte aux nues l'architecture traditionnelle japonaise et cite Terunobu Fujimori qui a construit une table découpée au ciseau à bois : "Lorsque vous posez une tasse dessus, elle ne tient pas, ce qui est entièrement de votre faute". Sur ce point précis, je ne vois pas bien la différence pour l'usager.

Ensuite je trouve dommage qu'elle aille chercher de nombreux exemples hors de France : Japon, Etats-Unis. Certes, Mona Chollet est Suisse mais elle vit en France et édite en France. Quand elle traite du mouvement des squats à Zurich, c'est pertinent, mais à propos d'habitat auto-construit, on pouvait aussi évoquer Notre-Dames-des Landes ou la jungle de Calais.

Enfin Mona Chollet professe des positions anticapitalistes radicales -sur lesquelles je ne la suis pas à tous les coups- et quand elle traite d'écologie, c'est un peu faible. Elle évoque l'imaginaire écologiste mais sa référence c'est Bambois ou la vie verte en 1973. Ca commence à dater.

C'est donc un livre qui m'a intéressée, qui m'a appris des choses, qui m'a donné à réfléchir mais qui m'a aussi parfois agacée. J'y ai trouvé des faiblesses mais aussi des envies d'autres lectures pour approfondir le propos.
Lien : http://monbiblioblog.revolub..
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