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Critique de darkdays


découvert par la précieuse contribution des éditions Flammarion lors de la généreuse opération Masse Critique Graphique.

il y a 500 ans, le 2 mai 1519, à Amboise s'éteignait l'homme de la Renaissance. 2019, en cette date anniversaire, Martin Clayton, responsable des impressions et des dessins au château de Windsor, rend hommage à Léonard de Vinci, et plus particulièrement aux feuillets de l'artiste dont il a la charge et qui appartiennent à la collection royale britannique depuis le XVIIe siècle.
préfacé par son altesse royale le prince de Galles, ce magnifique livre, format 26 par 21 de 1,262kg, est de ceux que l'on retrouve dans les boutiques des musées.
l'introduction retrace la vie, les voyages, l'oeuvre, et les choix de matériel de dessin de Léonard de Vinci qui maniait plume, encre, sanguine, mine, lavis, craie blanche, pierre noire et préparait ses supports dans un but de longue conservation.
juxtaposant réalisations par l'artiste légendées et explications du spécialiste, l'iconographie est centrée sur 200 études et croquis parmi les 600 détenus par la famille royale d'Angleterre.
esquisses de composition, études de détails pour des tableaux, travaux d'agrandissement, études scientifiques physiques et anatomiques, exercices de dessin, esquisses rapides, études de composition très fouillées, études de formes, de chevelures, de drapés, de paysages, de mouvements... tout autant de réalisations de Léonard de Vinci sur des feuillets composés de plusieurs croquis, parfois concernant des domaines différents sur le même support, et d'annotations rédigées avec une écriture inversée, l'écriture spéculaire. il était gaucher et, dans un soucis pratique, écrivait de droite à gauche pour laisser l'encre sécher. pour déchiffrer ses notes, il fallait donc un miroir. de nos jours, pour le lire, vous pourrez utiliser la fonction de symétrie disponible sur n'importe quel logiciel de création graphique.

cet ouvrage propose une approche chronologique des oeuvres et donc de la vie de l'artiste au gré de mécénat, commande et exil favorisé par le contexte politique.
de Florence à Amboise en passant par Milan et Rome, c'est ainsi que l'on suit le périple artistique de Léonard de Vinci : élève d'Andrea del Verrochio, artiste placé sous la protection de Laurent de Médicis et de Ludovic Sforza puis architecte militaire et ingénieur de César Borgia, au service du gouverneur de Milan et pour finir sous la protection de François Ier.
s'intéressant à la "peinture, la sculpture, l'architecture, la musique, l'anatomie, le génie civil, la cartographie, la géologie ou la botanique", il n'aura réalisé qu'une vingtaine de tableaux et très peu de projets menés
à leur terme. les feuillets mis en lumière par Martin Clayton constituent un héritage précieux, fruit de l'imagination, des observations, des dissections humaines et animales, parfois des transpositions pas toujours judicieuses (placenta humain à l'image de celui d'une vache), des réflexions et analyses de Léonard de Vinci.
les dessins sont expliqués, d'une part dans leur contexte historique, politique et géographique, et d'autre part, avec l'acquisition de connaissances de l'artiste, au fur et à mesure de ses études. la numérotation des dessins permet de pouvoir retourner d'un dessin à l'autre quand le conservateur souligne un lien entre eux.

plusieurs projets sont restés au stade d'étude : l'horloge aquatique, la bataille d'Anghiari - peinture murale qui aurait du s'étendre sur 18 mètres et les monuments équestres dont celui en hommage à Francesco Sforza commandé par son fils Ludovic et celui dédié au chef mercenaire Jacques de Trivulce.
pour le premier monument équestre qu'il voulait gigantesque, Léonard de Vinci avait même dessiné la machine pour couler le bronze. 75 tonnes qui seront finalement réquisitionnées pour faire des canons alors que l'armée française envahit l'Italie.
pour le second, Léonard de Vinci rencontre un problème technique de la réalisation liée à la position cabrée du cheval.
anatomie et mouvement, réflexion sur la posture de l'animal, les nombreux travaux préparatoires sont présents dans ce livre et même une étude plus tardive dans laquelle il s'attelle à résoudre le problème d'équilibre du monument.

parmi les oeuvres achevées, le conservateur nous révèle la conception de L'Adoration des bergers, L'Adoration des mages, La Dernière Cène, La Vierge à l'Enfant avec sainte Anne.
le choix chronologique permet aussi de suivre l'évolution des sujets d'intérêt de l'artiste. les Têtes grotesques laissent place aux Têtes d'hommes idéales. les paysages bucoliques italiens aux costumes, bâtiments et murailles du château d'Amboise.

ayant eu vent de la précédente publication de Martin Clayton, Léonard de Vinci anatomiste, je craignais que les études anatomiques soient exclues cette fois mais ce n'est pas le cas.
on retiendra - outre le dessin le plus fantaisiste d'une femme sans ovaire ni cœur - les études de nus, des poumons, du cœur, de l'épaule, du cou, des muscles, des os dont l'impressionnante représentation de la colonne vertébrale, les somptueux drapés, les multiples études d'allures des chevaux, le tracé des reliefs avec la précision des arbres, montagnes et affleurement de la roche, de nombreux dessins militaires (chars, armes, canons, fusils, mortiers, bateaux), ses considérations optiques, ses réflexions sur le système respiratoire et dans la fin de sa vie, ses préoccupations sur la mort et la destruction rassemblées autour d'une étude artistique de la dynamique, réaction de la matière lors du déchaînement des éléments en livrant une succession de dessins représentant des tempêtes, des déluges.

alors que d'un côté, est imprimé sur la jaquette abritant une couverture épaisse cartonnée, le Barrage sur l'Arno à l'est de Florence (probable commande de la Ville, sur laquelle on voit l'eau jaillir et la digue endommagée), de l'autre, la quatrième de couverture, on referme ce livre sur le Portrait de Léonard de Vinci par son élève Francesco Melzi, comme pour faire face une dernière fois à cet homme talentueux et créatif, qui voulait réaliser des traités sur la peinture, l'hydraulique, la mécanique, la croissance des végétaux et l'être humain.
si vous souhaitez voir les oeuvres précédemment citées, la plupart sont accessibles via le site officiel de la Royal Collection Trust.
Lien : https://www.rct.uk/collectio..
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