AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Melisende


Si je devais vous conseiller un seul auteur auto-édité, je pense que ce serait Paul Clément qui propose un travail assez extraordinaire, ou en tout cas un résultat qui n'a absolument rien à envier à celui des éditeurs de métier. La lecture des Décharnés avait déjà été une belle surprise mais Creuse la Mort est, à mon sens, bien au dessus.
Les cent premières pages de cette histoire sont sans doute celles qui m'ont le plus accrochée ces dernières années. Une tension grandissante, un suspens insoutenable. La suite est plus conventionnelle mais quel démarrage ! Bravo !

Frédéric – notre héros-narrateur – travaille dans une banque. Employé sans histoire, il prend sur lui chaque matin pour se rendre sur son lieu de travail et doit composer avec un patron qu'il déteste. Mais il faut bien gagner sa vie pour continuer à payer le loyer et à remplir le frigo familial. Les jours se suivent et se ressemblent mais ce matin-là, alors qu'il s'apprête à monter en voiture pour partir travailler, Frédéric tombe nez à nez avec un trou dans son jardin. Pas n'importe quel trou, non, un rectangle parfait qui lui fait penser à une fosse. Qui l'a creusé ? Pour quelle(s) raison(s) ?
Ce mystère l'obsède toute la journée. le soir venu, il peine à trouver le sommeil mais se rassure en se persuadant qu'il joindra la mairie le lendemain matin pour avoir des réponses à ses questions. Au téléphone, le fonctionnaire lui assure qu'aucune réparation n'a été entreprise dans son quartier et lui apprend que d'autres personnes ont constaté les mêmes trous étranges autour de chez eux. Les jours passent, notre héros s'échine à reboucher chaque soir mais chaque matin les fosses parfaites et inquiétantes ré-apparaissent. Il ne s'agit plus seulement d'un mystère à élucider mais d'une obsession qui ne lâche plus Frédéric.

Le lecteur suit un personnage qui sombre petit à petit dans ce qui semble être, si ce n'est la folie, au moins une descente aux enfers. Poursuivi par cette idée fixe, il en perd le sens commun. Ses proches ne le croient pas, il se met tout le monde à dos mais il persiste, persuadé de son bon droit.
J'ai adoré cette montée en tension. Petit à petit, le lecteur sent la pression – et l'incertitude – s'installer autour de Frédéric et il suit tout cela à travers ses yeux, donc au coeur de l'action.
Sincèrement, j'ai ADORE les 100-150 premières pages parce que j'ai adoré douter de la santé mentale du héros. Pendant tout ce temps on se demande s'il y a vraiment quelque chose de surnaturel là-dessous ou si une explication beaucoup plus rationnelle peut être apportée et vraiment, moi, c'est cet aspect là que je préfère dans le fantastique.
De ce fait, lorsque le surnaturel entre réellement en jeu – et est admis par tout le monde, pas seulement par le héros – je trouve que l'ensemble perd un peu d'originalité et revient dans une intrigue un peu plus classique. C'est bien mené et là aussi, il y a peu de temps morts, mais la tension redescend un petit peu et c'est presque dommage, selon moi.
Heureusement, le final est grandiose. Inattendu et avec ce je ne sais quoi de cynisme et d'absurde que l'on avait déjà pu percevoir dans les premières pages. de quoi refermer le livre amplement satisfait et avec l'envie de lire autre chose de l'auteur.

Souvent, quand on pense aux livres auto-édités, on s'imagine – et moi la première – que le travail éditorial laissera peut-être à désirer. Pas de correcteur pour retirer les lourdeurs de style et autres fautes d'orthographe, une mise en page bancale et au final, un livre qui paraîtra un brin amateur. Dans Creuse la mort, tout a été vérifié au millimètre. Il me semble n'avoir relevé aucune faute de frappe ou coquille (et c'est rarement le cas chez les “grands” éditeurs) et aucun faux pas dans visuel (ou peut-être juste une fois, un saut de ligne/un alinéa maladroit).
Ajoutez à cela une plume très soignée et qui ne rate jamais sa cible. J'aime beaucoup le style de Paul Clément. Pas de fioritures mais des phrases percutantes qui décrivent les scènes avec justesse et précision. C'est visuel et rythmé. Et cette entrée dans la psyché du personnage principal grâce à l'utilisation de la première personne du singulier… alala… excellent !

Cent premières pages inoubliables, une tension palpable, une chute aux petits oignons, une plume juste comme il faut, un soin particulier à la forme et une illustration de couverture graphique et percutante… qu'attendez-vous ?
Lien : http://bazardelalitterature...
Commenter  J’apprécie          61



Ont apprécié cette critique (6)voir plus




{* *}