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Critique de FaisantMal


Les avis littéraires… L'intention d'en écrire y est souvent. Si parfois l'intention initiale se transforme en quelques mots, en quelques phrases, très rarement en fait, l'élan initial parvient-il à un certain achèvement. Lorsque je me précipite et que je tente de le faire trop rapidement, les images, les paroles, les noms se bousculent dans ma tête. Je sais qu'il y a quelque chose, un sens, un angle de vue qui est là, à portée de main, dans cet amas de souvenirs trop précis, trop nombreux, trop clairs. Je ne veux pas nier l'importance de ces « détails » dans l'expérience de lecture. Ce sont eux qui donnent le sentiment de prendre part à une réalité, sentiment qui, d'une certaine façon, fait toute la puissance de la littérature. Mais je crois que le temps ordonne ces souvenirs, les organise, les distille à notre insu, qu'il les intègre à notre inconscient pour en garder l'essentiel.
Il y a plusieurs semaines donc, je terminais le Jeu de la Musique, une lecture qui m'avais particulièrement touché. Une lecture d'autant plus satisfaisante qu'on ne peut la qualifier de « facile » …
Pas facile d'abord au point de vue de la lecture elle-même. L'ouvrage se présente, à première vue, comme un recueil de courtes nouvelles plutôt sombres, souvent écrites à la première personne, parfois à la troisième, chacune ne représentant, typiquement, qu'une simple « tranche de vie ». On s'aperçois plus ou moins vite que les histoires sont reliées entre elles. On s'aperçoit aussi qu'il y a deux narratrices différentes (qui écrivent en « je »), mais on a du mal à les distinguer. le fait que les textes ne soient pas non plus présentés dans un ordre tout à fait chronologique ajoute au défi et, au début, on peut se sentir un peu perdu. À un certain moment cependant, on se fait prendre au jeu. On commence à apprécier ces zones grises qui apparaissent au gré de la lecture, qu'on doit patiemment garder dans cet état, et qui s'éclairent souvent beaucoup plus tard, dans certains cas seulement à la toute fin.
Pas facile non plus du point de vue émotif car c'est un livre bouleversant, une lecture qui joue dans nos entrailles. Les thèmes de la violence, du viol, de la dépression et du suicide entre autres y sont centraux. L'auteure, toutefois, a cette capacité de faire un rendu supportable de ces évènements, ou plutôt des marques qu'ils laissent sur les personnes, d'une manière réaliste et poignante. On pourrait penser que c'est une lecture déprimante au plus haut point, mais ce n'est pas le cas. Par son écriture sensible et un agencement des textes peut-être moins désorganisé qu'il n'y parait, Stéphanie Clermont réussit à garder une flamme allumée, une flamme qui laisse entrevoir la possibilité de jours meilleurs.
Ces jours meilleurs, nous les apercevons aussi à travers les liens d'amitié et d'amour qui unissent ces personnages. Eux qui tentent, tant bien que mal, de trouver leur voie à l'âge des grandes décisions dans un monde où multiplication des possibilités rime parfois avec désarroi. Car le Jeu de la Musique, c'est aussi le portrait d'une génération, celle des jeunes adultes actuels. Une génération en quête de son identité, aux prises avec ses contradictions, ses désillusions. On en fait la connaissance par l'entremises de personnages qui sont d'autant plus attachants que, bien qu'en apparence marginaux, ils nous ressemblent à bien des égards. de quelque génération que nous soyons. Tout simplement parce qu'ils sont pleins d'humanité.
On peut apprécier un livre pour plusieurs raisons. Quand je pense à ce qu'il me reste du Jeu de la Musique, de ce livre là en particulier, je pense avant tout aux émotions que sa lecture m'a fait ressentir. Je pense à ce « mal de vivre », aux détresses, aux désillusions mais je pense surtout à l'espoir caché derrière le malheur. le jeu de la Musique, c'est comme une chanson mélancolique qu'on affectionne. Justement parce qu'elle est à la fois désespérée et porteuse de cet espoir que nous espérons désespérément.
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