AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de SamDLit


# Rentrée littéraire, Rayon Art & BD # Biographie en 189 pages & cases


" Tu as un coeur assez grand pour contenir tout le ciel – et tout ce que le ciel signifie. » [ Alfred Stieglitz à Georgia O'Keeffe ]


Cette biographie dessinée et romancée d'une artiste étonnante vient en appui de la toute première rétrospective française de Georgia O'Keeffe (1887 - 1986) qui se tient au Centre Pompidou du 8 septembre au 6 décembre 2021.

Exposition et BD nous racontent de concert l'une des plus grandes figures de l'art nord-américain du XXe s, artiste assez méconnue en Europe jusqu'à récemment.


Envie de découvrir une Amazone de la peinture moderne américaine en suivant son parcours d'artiste et de femme ?
Laissez-vous tenter par cette bande dessinée, complète et précise qui se révèle une manière assez ludique et plaisante d'entrer dans l'univers particulier de Georgia O'Keeffe.



Le départ de l'album se situe au Nouveau-Mexique, là où Georgia s'est réfugiée après le décès de celui qui a été son amant, son mari, son mécène, son pygmalion et son tourment, Alfred Stieglitz, photographe de talent et propriétaire de la première galerie d'art qui exposera au grand jour le talent de cette pionnière de la peinture moderne américaine.


Georgia n'est pas seule au Ghost Ranch. L'entourent : Maria Chabot (écrivaine, avocate défendant les traditions artistiques amérindiennes, entrepreneur pour l'autre maison de Georgia au Nouveau-Mexique et depuis 1996 "Trésor vivant" de Santa Fe),
Anita Pollitzer (amie de longue date, photographe, activement impliquée dans la lutte pour l'obtention du droit de vote des femmes)
et Doris Bry (secrétaire, confidente et agent artistique de Georgia).
Celles-ci ne seront pas de trop pour mener à bien l'inventaire artistique de feu Stieglitz, un testament constitué de photographies, dessins et correspondances.



Au cours de ce travail de fourmi, le lecteur refait avec Georgia et ses souvenirs l'envers du chemin parcouru, de ses tout débuts aux écoles d'Arts, Chicago, N.Y, 1905-1907 en passant par la première exposition de ses fusains à la galerie 291 par celui qui deviendra son mari, Alfred Stieglitz.


Georgia O'Keeffe a traversé l'essentiel des aventures esthétiques du XXe s. Dans les années 1920, elle appartient au cercle restreint des inventeurs du modernisme américain, puis participe, dans les années 1930, à la recherche identitaire qui marque les États-Unis, avant de devenir dans les années 1960 une pionnière de la peinture abstraite « hard edge » (transitions brusques dans les couleurs)


En 1929, elle est la première artiste femme à intégrer les expositions du MoMA venant d'être créé. Plus tard, elle est la première encore à qui les plus grands musées américains consacrent une rétrospective (Chicago en 1943, le MoMA en 1946).


Pour la génération d'artistes féministes des années 1960, Georgia O'Keeffe fait figure de « brise-glace », elle est celle qui ouvre la voie à la reconnaissance d'un art qui n'est plus nécessairement associé au genre de son auteur.


Sensualité et spiritualité dans son oeuvre ne font qu'un et s'unissent en un même mouvement sacré, une même vision symbolique du monde: que ce soient dans ses immenses fleurs, les tableaux les plus appréciés de son temps et les plus connus, ses représentations du désert, des carcasses, crânes d'animaux, os, etc...
Tout est lié à la terre et au cosmos.


L'artiste avait également affirmé dans sa création une volonté de précisionnisme dans l'abstraction, l'essentiel se réduisant parfois à un simple trait.



Etonnante cette femme qui même victime de dégénérescence oculaire (macula) réussit à continuer à peindre sans assistance jusqu'en 1976 et à dessiner ensuite (avec aide) jusqu'à la fin de sa vie ce que son esprit voyait, voyageant dans les nuages et le ciel.


"Ma peinture est ce que je dois rendre au monde pour ce que le monde me donne."


GEORGIA O' KEEFFE - AMAZONE DE L'ART MODERNE
Aux éditions Steinkis, 02/09/2021, Coll. Roman graphique
Luca de Santis au scénario, Sara Colaone au graphisme
Laurent Lombard pour la traduction

- Dans le cadre de l'exposition du Centre Pompidou, 08/09 au 06/12/2021 -


Dans cette BD, les dessins colorés jaune soleil au graphisme assez rudimentaire, aux traits presque grossièrement simplifiés par moments, représentent les périodes de vie de Georgia au Nouveau-Mexique.


Ses souvenirs passés, séparés distinctement par tranches de vie (artistique et humaine) empruntent un design et un coloris propres à chaque période, ce sont ceux qui m'ont le plus attirée, avec leur petit air vintage qu'accompagnent certaines remarques "d'humour" piquantes.

"Si les pieds sont les organes de la marche pour l'homme, ils sont des organes sexuels pour la femme"


Cette séparation claire entre l'hier et l'aujourd'hui donne un contraste réussi entre l'actuelle Georgia qui nous parle et les étapes antérieures de son apprentissage, de sa création et de ses moments de vie avec les personnes qui ont le plus compté humainement et artistiquement dans sa vie, ses moments-clés, son groupe restreint de fidèles, d'amis, d'artistes.

[ Une courte présentation avec biographie de chacun est reprise en fin d'album, tout comme une liste de quelques références bibliographiques ayant servi de base à ce roman graphique ]


Le découpage des planches, les bulles rectangulaires des dialogues notamment, serait le petit bémol à cet ouvrage, il est par moments un peu trop imprécis, perdant parfois le lecteur dans le fil des dialogues entre les différents protagonistes.


Un personnage énigmatique, au crâne de bovidé, revient régulièrement dans la bd, comme un interlude, rappeler à Georgia son pari, celui où son âme (ses yeux) a été mise en jeu et nous renvoie ainsi avec elle aux question de la vie, de la mort, au sens de l'éternité d'un moment de gloire ou de bonheur.


Ce crâne est également un clin d'oeil à la couverture de l'album, aux légendes amérindiennes (ou au diable tout simplement) tout comme il fait référence à l'une des séries de tableaux les plus célèbres de Georgia O'Keeffe (dont le "Jimson Weed/White Flower No. 1" vendu à près de 45 millions de dollars chez Sotheby's en 2014)


Cette biographie en images m'a donné envie d'en apprendre plus sur cette artiste, sa vie et ses oeuvres. J'hésite encore entre un petit trip à Paris pour admirer l'exposition qui lui est consacrée.
Ou prendre la direction du Nouveau-Mexique pour visiter le Musée O'Keeffe et loger à L'Abiquiú Home.

https://www.okeeffemuseum.org/


https://www.centrepompidou.fr/fr/programme/agenda/evenement/60bdJRm


https://www.sortiraparis.com/arts-culture/exposition/articles/258194-georgia-o-keeffe-au-centre-pompidou-pour-sa-premiere-retrospective-en-france-nos


https://www.rtbf.be/culture/arts/artistes/detail_decouvrez-georgia-o-keeffe-l-icone-de-l-art-americain-au-centre-pompidou?id=10837554
Commenter  J’apprécie          3321



Ont apprécié cette critique (29)voir plus




{* *}