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Critique de Biblioroz


Publié en 1878, il faut tenter de s'imprégner de ce siècle, où les romans à suspens n'inondaient pas les productions littéraires, pour saluer ici le travail de mise en scène de l'auteur. Et j'ai trouvé son procédé tout à fait ingénieux qui consiste à introduire, souvent par le truchement d'une personne ou même d'une rédaction de pièce de théâtre, les différents éléments de cette intrigue mêlant confession, impression glaçante, tourments de conscience, peur irraisonnée, disparition et mort inexpliquée.

Tout commence par une consultation chez un médecin renommé. En proie à la peur de devenir folle, la comtesse Narona vient confesser le frisson glacial qu'elle a ressenti lorsque son regard a croisé celui d'Agnès. Pourtant, il n'y avait rien de haineux, aucune animosité dans les yeux de cette femme. Il faut dire qu'elle aurait pu lui renvoyer un regard accusateur vu que la comtesse lui a tout de même volé, sans le savoir, son fiancé, lord Montbarry.
Belle entrée en matière qui fait judicieusement planer le doute sur ces deux femmes. La bonté d'Agnès est-elle feinte ? Et la comtesse Narona, est-elle victime de cette haine ? Sur quelle base se fonde son puissant pressentiment qu'elle s'est trouvée, face à l'ancienne fiancée, au « commencement de la fin » ?

L'auteur a joué sur les détails physiques et psychologiques de ces deux femmes. La comtesse, avec sa pâleur extrême et ses yeux noirs étincelants, passe de la fragilité à la froideur, d'une attitude toute tremblante à une force brusque, voire cruelle. S'y oppose les yeux bleus d'Agnès qui renvoient douceur et bonté mais qui cachent peut-être une blessure profonde d'un amour humilié mais toujours présent.
Tout ceci nous mène à Venise, dans un vieux palais suintant d'humidité où le couple fraîchement marié ne coule pas des jours heureux. Dommage que William Wilkie Collins ne se soit pas du tout penché sur les relations de ce couple et leurs modifications. C'est un développement qui m'a manqué dans toute cette histoire.
La narration est parfois monotone mais j'ai savouré la beauté du langage de l'époque dans les différents dialogues.
Les ingrédients de ce suspens sont, somme toute, bien classiques, mais ils n'en donnent pas moins un résultat surprenant baignant dans une ambiance bien glauque de palais transformé en hôtel hanté. D'ailleurs, le cadre, extérieur comme intérieur, aurait, là aussi, mérité d'être étoffé pour réussir une totale immersion et un bel équilibre avec les images bien développées des personnages.

La lecture est rapide, prenante et originale pour un roman du XIXème siècle. La comtesse Narona qui, dès le début, pressentait son malheur dans les yeux d'Agnès ne s'y est pas trompée.
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