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Critique de Stelphique


Chronique

Moi, Tituba sorcière

« Ne se déclare pas sorcière qui veut! »

Il faut l'avoir éprouvé dans la chair et dans le sang. Il faut l'avoir approché des feux et des tempêtes…Il faut l'être et l'incarner avec sagesse…
C'est pour cela, que Toi, Tituba, peut se déclarer sorcière.
Tu es femme, belle, forte, rompue, éveillée, serviable, amoureuse, bienveillante, initiée, troublée, seule, redoutée, rose, naïve, guérisseuse, bien-aimée…
Mais tu choisis d'être Sorcière, parce que toi seule connaît la valeur de ce mot, ce qu'il représente, ce qu'il sous-entend, ce qu'il contient. Tu sais que les autres en ont fait une injure, lui ont dessiné une réputation, lui ont inscrit des dénominateurs cachés, l'ont couvert d'opprobre…Et pourtant, tu es la sorcière la plus inspirante de toute l'Histoire, et je suis bien heureuse que tu aie trouvé l'oreille attentive de Maryse Condé pour confier ton histoire bouleversante…

« Que pouvais-je donc espérer? »

J'espère que d'autres histoires vont ressortir des cendres, que d'autres oreilles vont entendre, que d'autres mains vont écrire, que d'autres coeurs purs vont rétablir justice. Maryse Condé, dans ce roman, décide de refaire vivre une affaire classée de Salem. Elle décide de romancer l'histoire de Tituba, parce que l'Histoire et les hommes l'ont écarté de la lumière. Effacer la femme, les femmes, les souvenirs, les outrages, les condamnations, les pendaisons, les corps, la mémoire. C'est ce qu'il s'est passé à Salem, des accusations sordides, obscures, infondées, douteuses, puériles, fatales à l'encontre des femmes. Il ne faisait pas bon vivre dans cette ville en 1692, pour une femme, et d'autant plus, si elle était noire et guérisseuse. Ce roman, c'est le croisement de plusieurs histoires dramatiques qui ont touché et sévit dans l'Amérique du Nord au XVII ème siècle…Entre l'esclavagisme, le racisme, le sexisme, l'obscurantisme et la chasse aux sorcières: c'est un déferlement d'Histoires de haine…Et je crois que comme Tituba, il ne me reste que des questions sans réponses pour trouver du sens aux explosions de confettis de fleurs, de chair et de sang, auprès du flamboyant…

« N'en avais-je pas assez de ce cortège de déboires qui accompagne les affections? »

Il faudra bien que je me résolve à dire non. Car de l'affect, j'en ai eu trop. Trop de compassion, d'admiration, d'épanchement, aussi envers cette personne mi-réelle, mi-fictionnelle, Toi, Tituba, sorcière…Comment rester insensible à tes souffrances, à tes vagues d'amours, à tes sortilèges de bienveillance, à ton charme fou, à tes mots si doux? Comment rester indemne face à ce qu'ils t'ont pris, arraché, enlevé, nié, annihilé?
Je voudrais apprendre à rameuter, comme toi, les forces de la nature. Je voudrais rameuter, toutes les femmes du monde, toutes les sorcières de jadis et de demain, afin que dans nos nuits, tu nous reviennes, visible, dans la forêt…Et comme toutes les affections, il y a eu des déboires-comme j'ai eu mal de ce qu'il t'ont infligée- mais il y a eu aussi des bouts de bonheurs- comme j'ai eu plaisir à lire la délicatesse de la plume de Maryse Condé- que je peux affirmer, Moi, Stelphique Fée, que j'ai eu un coup de coeur pour ce livre…
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