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Critique de Chestakova


« Tituba et moi avons vécu en étroite intimité pendant un an . C'est au cours de nos interminables conversations qu'elle m'a dit ces choses qu'elle n'avait confiées à personne ».
Maryse Condé introduit son récit par ces quelques mots, signifiant sa volonté d'écrivaine de donner vie par la fiction à Tituba. Elle fait sa rencontre dans les archives des procès pour sorcellerie qui ont marqué l'histoire de la communauté puritaine de Salem à la fin du 17ème siècle. Tituba, esclave noire venue de la Barbade y comparait, mais aucun historien ou écrivain, n'a jugé bon de s'intéresser à elle. Ainsi dans les choix culturels effectués par des générations d'hommes blancs, la négation d'une femme, noire, esclave, prend tout son sens en terme d'exclusion et d'oubli volontaire.
Maryse Condé s'empare de Tituba pour lui donner un corps, une pensée, une enfance, un devenir. le portrait qu'elle réalise dans son récit est un pamphlet profondément féministe, elle reprend en outre l'héritage de Frantz Fanon en inscrivant son personnage dans une conscience progressive de son identité d'exclue, qui l'ouvre à la révolte.
La force du récit de Maryse Condé tient à la narration elle même, à la première personne, qui fait endosser par l'auteure la vie et l'histoire de son personnage. Tituba raconte ainsi l'accumulation des marques de l'asservissement, du viol dont elle est née à toutes les violences qui jalonnent sa vie: la pendaison de sa mère, les amitiés transfuges qui se retournent contre elles, la violence des hommes, la négation de son existence au sortir de la prison…Tituba progressivement ouvre les yeux sur la réalité de sa condition, elle tente de choisir contre vents e marées, une forme de liberté qui l'isole des autres: sa case en marge des plantations et des demeures d'esclaves, son initiation aux mondes occultes par Man Yaya, son désir pour John Indien qu'elle assume, son amour pour Iphygène dont elle devient l'égale dans la révolte.
La mort par pendaison de Tituba à la Barbade revêt ainsi une portée messianique, annonciatrice de toutes les révoltes à venir.
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