AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Nadou38


J'avais beaucoup aimé le roman graphique de Catel qui retraçait la vie d'Olympe de Gouges, personnage de notre histoire ô combien passionnant.
Je n'ai donc pas hésité à sélectionner ce nouvel ouvrage sur Olympe de Gouges et Nicolas de Condorcet, lors de la dernière masse critique pour compléter et enrichir mes connaissances très sommaires.

Je vais commencer par remercier Babelio pour l'organisation de cette masse critique et les éditions Les Plis du Ciel pour l'envoi de cet ouvrage (ainsi que le petit message très sympathique de Chrystelle Desbordes de la direction éditoriale) car je suis extrêmement ravie qu'il me soit attribué.

Ce recueil est rapide à lire, il fait à peine une centaine de pages.
Du point de vue de la forme, il est très agréable car les textes sont aérés et alternés avec des reproductions d'oeuvres de Marianne Plo.

Quant au contenu, très riche, il est construit de la façon suivante :
-une présentation de Chrytelle Desbordes qui explique entre autre son désir de rendre hommage à Olympe de Gouges et son choix de faire un parallèle avec Nicolas de Condorcet.
-Une première partie qui contient l'ensemble des textes d'Olympe de Gouges associés à sa « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne » qui datent de 1791.
-Une seconde partie, plus courte, qui concerne Nicolas de Condorcet. Elle propose son texte « Sur l'admission des femmes au droit de cité » qu'il a écrit en 1790. Il est complété par les articles de la « Déclaration des droits de l'homme et du citoyen » de 1789 dont il a participé à la rédaction.
-Une dernière partie qui regroupe les biographies de ces deux personnages historiques ainsi que celle de Marianne Plo.

Concernant la partie d'Olympe de Gouges :

Un premier texte sur les droits de la femme où elle questionne l'homme sur la légitimité de sa domination. L'introduction en donne tout de suite le ton :
« Homme, es-tu capable d'être juste ? C'est une femme qui te pose la question ; tu ne lui ôteras pas du moins ce droit. Dis-moi ? Qui t'a donné le souverain empire d'opprimer mon sexe ? »

On lit ensuite le Préambule et les 17 articles de la « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne (1791) ».
Le premier article est éloquent je trouve par la force de son message et sa simplicité : « La femme naît libre et demeure égale à l'homme en droits. »
J'ai trouvé intéressant le choix de l'édition de publier dans le même ouvrage les articles de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, car on peut facilement observer comment Olympe de Gouges s'en est inspirée au niveau de la structure et du contenu, et là où elle nuance.

Le Postambule qui suit s'adresse directement aux femmes où Olympe de Gouges les appelle de ses voeux à se réveiller et à reconnaitre et affirmer leurs droits. Elle y évoque les injustices qui leur sont faites, mais aussi ce qui pourrait - faudrait - changer pour le bien-être tous, hommes et femmes ensembles.
« Si tenter de donner à mon sexe une consistance honorable et juste, est considéré dans ce moment comme un paradoxe de ma part, et comme tenter l'impossible, je laisse aux hommes à venir la gloire de traiter cette matière ; mais, en attendant, on peut la préparer par l'éducation nationale, par la restauration des moeurs et par les conventions conjugales. »

Olympe de Gouges est opposée au mariage tel qu'il est légiféré à son époque, elle écrira d'ailleurs « Le mariage est le tombeau de la confiance et de l'amour. » Elle propose dans son manifeste une nouvelle formule de l'acte conjugal intitulé « Forme du contrat social de l'homme et de la femme », et y justifie ses intérêts et avantages pour la société.

Le dernier texte d'Olympe de Gouges est une lettre qu'elle adresse à la Reine de France et où elle lui demande d'agir en faveur des femmes bien qu'elle soit elle-même dans une situation on le sait bien périlleuse. En voici un passage :
« Il n'appartient qu'à celle que le hasard a élevé à une place éminente, de donner du poids à l'essor des droits de la femme, et d'en accélérer les succès. Si vous étiez moins instruite, Madame, je pourrais craindre que vos intérêts particuliers ne l'emportassent sur ceux de votre sexe. Vous aimez la gloire : songez, Madame, que les plus grands crimes s'immortalisent comme les plus grandes vertus ; mais quelle différence de célébrité dans les fastes de l'histoire ! L'une est sans cesse prise pour exemple, et l'autre est éternellement l'exécration du genre humain. » J'ignore si la reine a pu lire cette lettre, des spécialistes du sujet pourront peut-être me le dire, mais il semble en tout cas que cela n'ait pas influencé la reine à l'époque.


J'ai trouvé également intéressante et instructive la partie sur Condorcet car si j'avais déjà entendu parler de ce personnage, j'en ignorais beaucoup de choses. La biographie m'a permis de mesurer l'importance du rôle de cet homme dans la lutte contre l'esclavage, sa participation dans la rédaction de la déclaration des droits de l'homme ainsi que, et ce qui justifie sa présence dans cet ouvrage, sa lutte pour l'admission des femmes au droit de cité. Son texte est une sorte de plaidoyer qui dénonce cette soi-disante « supériorité d'esprit » en démontant, un par un, les arguments avancés par la gente masculine de l'époque. On y retrouve dans son argumentation la logique implacable du mathématicien.

« Par exemple, tous n'ont-ils pas violé le principe de l'égalité des droits, en privant tranquillement la moitié du genre humain de celui de concourir à la formation des lois, en excluant les femmes du droit de cité ? » Condorcet

« Enfin, dira-t-on qu'il y ait dans l'esprit ou dans le coeur des femmes quelques qualités qui doivent les exclure de la jouissance de leurs droits naturels ? Interrogeons d'abord les fait. Elisabeth d'Angleterre, Marie-Thérèse, les deux Catherine de Russie, ont prouvé que ce n'était ni la force d'âme, ni le courage d'esprit qui manquait aux femmes. » Condorcet

Je dois en revanche avouer que, même si j'ai apprécié leur présence, je n'ai franchement pas vu le lien entre les oeuvres de Marianne Plo et les textes proposés. Mais ceci n'engage que moi, d'autres lecteurs y trouveront peut-être une interaction pertinente.Cela ne m'a toutefois nullement gêné, ni empêché d'apprécier l'ouvrage dans son ensemble.

Merci aux lecteurs qui m'ont lue jusqu'au bout car je n'avais pas prévu de faire un billet aussi long. C'est un recueil de textes importants et incontournables pour qui s'intéresse à la recherche de l'égalité entre les hommes et les femmes. Je le conseille vivement.
Commenter  J’apprécie          176



Ont apprécié cette critique (17)voir plus




{* *}