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Critique de Eskalion


Quand on entame un roman de John Connolly , il est bien difficile d'en interrompre momentanément la lecture pour vaquer aux choses ordinaires de la vie quotidienne . Son dernier roman « Les âmes perdues de Dutch Island » n'échappe pas à cette règle, et vous vous laisserez immerger dans celui-ci avec autant de facilité que de plaisir à le découvrir.

Pourtant cette fois ci, Charlie Parker, le personnage fétiche de Connolly, n'est pas de la partie (même si son nom y est évoqué une ou deux fois). Qu'importe, car l'histoire que vous livre l'auteur ne manque ni de piment, ni de turpitude et encore moins d'action.

Dutch Island. Une petite île au large de l'État du Maine, qui ne compte que quelques habitants en hivers, et en accueille un plus grand nombre quand celle ci se pare à nouveau des couleurs estivales. Une île chargée d'un passé tumultueux, que les plus anciens, ceux dont les familles ont grandi et vécu sur place, appellent entre eux, le Sanctuaire.

Une île dont les premières pages de son histoire, écrites au XVII ème siècle, l'ont été avec le sang des premiers colons, massacrés par un être malfaisant aidé d'une bande d'indiens renégats, revenu se venger d'avoir été banni par les siens quelques mois plus tôt. Un carnage.

Joe Dupree, est le descendant d'un des rares survivants à l'expédition punitive. Il officie sur l'île comme officier de police, aidé dans sa tache par des adjoints qui viennent quotidiennement du continent par ferry. Force de la nature, c'est un véritable géant qui s'acquitte de sa tâche avec professionnalisme. Mais c'est aussi un taiseux, un homme au regard triste qui lui vaut le surnom de Melancoly Joe. Malgré tout, tout le monde a pour lui un profond respect.

Mais l'île compte d'autres personnages singuliers. A commencer par Richie, un ado un peu attardé qui aime à s'enfoncer dans la forêt pour y passer ses journées. Un univers végétal dont il connait les moindres recoins, et où il y côtoie « les autres » .Il n'hésite pas parfois à s'approcher du Site, le lieu où autrefois la terre a connu la fureur et la folie des hommes, là même où fut perpétré le massacre quelques siècles plus tôt. Un endroit que les îliens préfèrent éviter, afin de ne pas y déranger les âmes perdus de Dutch Island.

Jack lui, est un vieil homme, artiste de son état, qui n'a de cesse de peindre toujours le même paysage. Un homme dont son penchant pour l'alcool a plus de notoriété que les toiles qu'il produit, même si depuis que le jeune Danny vient lui rendre régulièrement visite, il s'efforce de se tenir sobre en sa présence, non sans difficulté.

Danny lui, est arrivé sur l'ile avec sa mère il y a quelques temps déjà. Richie et Jack sont ses seuls amis. Ils vivent un peu à l'écart dans une bâtisse que Jack a mis à leur disposition. Joe le policier, leur rend parfois visite pour savoir si tout va bien. Sans doute aussi parce qu'il éprouve une certaine attirance pour Marianne, la mère de l'enfant , que sa timidité empêche d'exprimer.

Ainsi va la vie sur Dutch Island. Une vie au calme, proche de la nature, isolée de ce monde moderne, bruyant et toujours plus pressé. Tout irait donc pour le mieux, si depuis quelque temps, au fond d'eux mêmes, les anciens,ki ne ressentaient un malaise diffus. le sentiment que les choses changent sur l'île, que d'autres se préparent. Certains signes se manifestent. Personne n'en parle, mais chacun sent que les bouleversements à venir seront néfastes pour l'île et ses habitants.

A des centaines de kilomètres de là un homme rêves du fond de sa cellule. de meurtres, de sang et de vengeance.

le passé remonte à la surface du présent et le parasite.

Quand il s'évade de prison, Edward Moloch se met en route, entouré d'une équipe de sbires sanguinaires. Des morts jonchent leur parcours pour atteindre la cible ultime qu'il s'est juré de retrouver, de torturer et de tuer: sa femme. Et leur route sanglante va les mener tout droit à Dutch Island , qui s'apprête donc à vivre un nouveau drame.

A moins que l'île, repus du sang des hommes ne décide d'avoir son mot à dire.

On ne dira jamais assez tout le talent de John Connolly pour écrire des romans d'une remarquable efficacité. L'histoire est solide, les personnages puissants, et le suspens distillé avec talent tout au long des chapitres, alourdissant peu à peu l'atmosphère à mesure que la tempête approche.

On retrouve une nouvelle fois la patte de Connolly dans ce soupçon de fantastique dont il agrémente ses romans, et qui leur donne ce relief si particulier , sans jamais verser dans la facilité surréaliste pour faire aboutir son scénario. Jouant continuellement de la frontière entre le réel et le surnaturel , le dénouement s'inscrit pourtant toujours dans une réalité particulièrement travaillée, et dont le lecteur ne s'est au final jamais vraiment éloigné malgré les apparences.

John Connolly est aujourd'hui un auteur majeur de la littérature policière contemporaine, que vient confirmer ce dernier roman. Il porte dans sa plume toute la magie de l'Irlande, sa terre natale, qui nourrit son écriture et son art consommé de l'illusion pour duper son lecteur. Un lecteur victime consentante et qui en redemande, encore et encore !

Une nouvelle fois , John Connolly montre la constance qui est la sienne à offrir à ses lecteurs d'excellentes histoires à ne manquer sous aucun prétexte. « Les âmes perdues de Dutch Island » en fait incontestablement partie !
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