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Critique de luCa


luCa
27 septembre 2012
Un nouveau roman, un nouvel auteur. Thomas H. Cook et ses Leçons du Mal (Master of the Delta, en langue originale), explicite dans sa version française - le roman tourne autour de ces leçons, de ces fameuses leçons sur le Mal, cours proposé par Jack Branch, professeur et narrateur du récit, souvent définit comme le fils de son père, le vieux Branch, renommé dans toute la ville.

La relation, maître, véritable master qui agit dans l'ombre en toute impunité, qui noie les personnages dansla bourbe trouble de son delta. "Tu n'es pas quelqu'un, tu es le fils de ton père", phrase bourdonnante, irritante, récurrente. Une phrase qui va rapprocher les deux protagonistes principaux : Jack, comme le fils du grand professeur Branch; Eddie Miller, comme le fils du "tueur de l'étudiante", Deux pères illustres, aux deux extrêmes de la hiérarchie. Et pourtant, le professeur va voir en son élève son double, ce jeune homme qui essaie, tant bien que mal, de s'enlever son tatouage, apposé à la naissance. Tenter de s'en sortir. Là aussi, une question de relation. Comment définir cette relation professeur-élève ? Jusqu'où peut aller sa compassion ? Son soutien ? Lorsque le sujet du prochain devoir de ce cours sur le Mal est un exposé sur un personnage emblématique - et qu'Eddie décide d'enquêter sur son père - l'engrenage est lancé. Bribes, fragments d'enquête, photos retrouvées, que le jeune s'efforce de répertorier scrupuleusement. le lecteur, lui, obtient d'autres fragments, ceux d'un témoignage, d'un interrogatoire, situé post-trauma où Brach revient sur un Mal passé et tente de comprendre comment cela a pu se produire. Oui, mais quoi ? le lecteur voit trouble, ces bribes ne permettent pas d'y voir clair, et l'écrivain, de sa plume ô combien habile, se plaît à entretenir le suspens. Tout est là pour nous perdre, l'amour et la relation avec Nora Ellis, la complicité rageante entre Eddie et le vieux Branch, la rivalité avec d'autres élèves, de fausses pistes. Lorsqu'on s'approche de l'ancien lieu de crime du père d'Eddie, on se cripse - on attend - avec une certaine perversion, cet évènement indicible. Et il arrivera, ou ... n'arrivera pas. Tant de spéculations, tant d'attente, et finalement, le coup de théâtre n'impressionne pas, et déçoit de simplicité. Mais l'habileté de Thomas H. Cook nous impressionne. Lui aussi, nous a mené sur une fausse piste, celle de l'extraordinaire, alors qu'il fallait rester raisonnable. Lui aussi a succombé à la tentation de trouble, en faussant notre relation, auteur-lecteur, auquel on avait entièrement confiance. Encore ces satanées relations, dont les racines semblent ne plus avoir de limites. Ce sont elles, les véritables tisseuses d'histoires, qui lient personnages et mots entre eux. Plume ingénieuse à n'en pas douter, plume plutôt "littéraire" pour un policier au domaine plus subtil - pas de crime sanglant, pas de massacre organisé à élucider - juste les méandres d'un esprit encombré par un Mal rongeur et par une soif d'évasion. Ici, pas de doutes, la plume sauve le récit, même si l'on s'attache à ces personnages déterminés, dans tous les sens du terme. Une belle leçon d'écriture.


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