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Critique de Jolap


J'ai tardé à écrire une critique car ma lecture a été laborieuse, hésitante et sans beaucoup de relief.
Je me suis retrouvé en conférence de rédaction à balayer les sujets divers avec la ferme recommandation de ne pas dépasser cinquante caractères pour tel ou tel sujet. J'ai ressenti une certaine frustration. Pas d'angle d'attaque. Peu de profondeur. Un projecteur sans éclat!
Pourtant ce sujet m'interpellait car l'actualité des années 60/70 a éveillé mes tous premiers questionnements d'enfant, a accompagné mon adolescence et ma prime jeunesse. Des changements forts, mêmes radicaux ont bousculé le ton poudré des échanges entre les jeunes et leurs parents, faits de non-dits, de sujets tabous et de codes imposés, quels que soient les milieux auxquels ils appartenaient me semble- t-il. Au moment où j'écris je pense au Petit Nicolas de Goscinny qui reflète si bien l'ambiance, la place de la femme et ses préoccupations, le sens de la famille, la hiérarchie dans l'entreprise, les priorités, l'école, la morale dans les années 60. .
Evolution, révolution, mutation, rupture, des événements en chaîne, des coups de pieds magistraux, ont fait voler en éclat les règles établies. Dans la vie d'un jeune il y a : avant 68 et après 68. de cela je reste convaincue.
Tout est consigné dans cet ouvrage. Une véritable encyclopédie où chaque soubresaut sociétal ou politique, qu'il se manifeste en France ou à l'étranger alterne avec l'histoire de quatre jeunes gens représentant des milieux différents, Lorenzo, Antoine , François et Michèle. Les trois garçons sont amoureux de Michèle…. évidemment et représentent ce qu'il était de bon ton dans ces années là, le changement. Ils incarnent presque mot à mot, fait pour fait, ce que la jeunesse de cette époque comptait dans ses rangs : le blouson noir « prêt à arpenter la terre à pied par amour de l'humanité » est incarné par François. Antoine lui « voudrait changer par l'action la société ». Quant à Lorenzo, « confiant, réfléchi » il fait du théâtre et rejoins plutôt, sans prendre de risques inutiles, le camp des intellectuels. Michèle est préoccupée par la place de la femme dans la société, la régulation des naissances.. le compte est bon ! le tour est joué…
Alors tout est parfait semble-t-il. L'Histoire se mêle généreusement aux personnages, seulement voilà ! il m'a manqué ce petit supplément d'âme qui fait qu'un ouvrage ne ressemble à aucun autre surtout pas au magazine « 24 heures d'actualité »diffusant à l'époque les têtes de chapitres que l'on devait absolument savoir pour avoir l'air de tout savoir sans donner l'impression de se tromper.
Il m'a manqué cette fougue des étudiants au quartier latin lors des manifestations les plus cinglantes. Je n'ai pas pu lire le caractère dramatique de la guerre du Vietnam. Je n'ai pas ressenti cette insouciance mêlée d'enthousiasme et d'insolence lorsque Françoise Sagan, Brigitte Bardot, Vadim et tant d'autre portaient en étendard les couleurs de St Tropez. Je n'ai pas eu de creux à l'estomac ni de fourmis dans les jambes lorsque l'auteur nous parle du rock and roll, de twist ou de madison ! La vague des hippies et leur philosophie complètement inédite, colorée, inattendue quelque peu utopique m'a laissée de marbre. Je n'ai pas imaginé une seule seconde les français scotchés devant leur petit écran en noir et blanc pour voir ébahis, Amstrong marcher sur la lune. Pour résumer je suis restée collée à terre !
Et pourtant j'ai tant éprouvé de bien-être lorsque Jean-Michel Guenassia évoquait cette période (Le club des incorrigibles optimistes) avec la précision d'un métronome, mais avec des petits nuages qui calaient les événements et les rendaient souples, mobiles, digestes, bien dessinés et terriblement évocateurs. Je sais bien qu'un écrivain peut nous parler de la grande Histoire avec le plus grand sérieux et l'édulcorer avec une romance (au choix) sympathique, prenante, oppressante, surprenante, violente mais toujours imaginative. Tout cela est possible ! je l'ai lu. J'en suis certaine.
Alors je referme ce bouquin que m'ont si aimablement offert Babelio et les éditions Albin Michel que je remercie avec une légère amertume. Celle de ne pas honorer un cadeau. Celle d'être passée à côté d'une mine de documents, une mine de connaissances, une mine d'informations. D'avoir fermé les yeux sur un travail colossal de documentation, d'avoir mis de côté la chronologie, l'exactitude des faits relatés.
Cependant, je les remercie bien chaleureusement.
Je terminais « Laisse tomber les filles » lorsque j'ai appris le décès de France Gall. Alors le titre m'a titillée. Une voix tour à tour cristalline et acidulée est venue rôder près de moi et m'a rappelé les passages en boucle de certains morceaux. Il m'a rappelé que j'ai vécu ces années 60 avec une « pêche » incroyable ! j'ai beaucoup chanté, beaucoup dansé, beaucoup espéré, beaucoup aimé la vie et pour cela, au fond, je remercie vivement Gérard de Cortanze d'avoir écrit ce texte.


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