La presse écrite ne vaut guère mieux. Minute, dans une prose rappelant les heures les plus sombres de l'histoire de France, assure que nombre de jeunes français, dans un geste de salubrité publique, seraient prêts à accompagner Cohn-Bendit à la frontière, pour ne pas abandonner la rue à la chienlit des enragés. L'aurore voit dans ces événements la "main de véritables commandos sur le mode "prochinois", conduits par "des meneurs étrangers". L'Humanité, jouant les Ponce Pilate, renvoie dos à dos les forces de répression avec leurs matraques et les aventuriers gauchistes .......Le Figaro fait de ces étudiants des "jeunes relevant de la correctionnelle plutôt que de l'université. Le Parisien titre " Paris en état de siège"
Moi je trouve qu'il marque la fin d'un rêve merveilleux:celui d'une réconciliation générale, sous la bannière de la démocratie américaine, de deux communautés. Mais cela ne m'empêche pas de penser que le pacifisme est plus que jamais de mise. (Cette citation concerne la mort de Luther King)
Antoine sourit. Le garçon de café vient d'apporter l'addition. Il a fini sa journée. Un autre va prendre sa place. Il faut régler maintenant. Qui va payer ? C'est l'homme qui paie. Dans cette France prospère, toutes les conditions sont réunies pour que les familles consacrent à leur progéniture de l'argent de poche. Variable selon les familles et les moyens. En 1963, le pouvoir d'achat des jeunes gens et des jeunes filles dépasse les 10 milliards de dollars, soit une augmentation depuis dix ans de 30% ! Les parents de Michèle ont mis au point un barême d'une complexité infinie, lié aux résultats scolaires avec pénalités et tranches de gratification. Les parents d'Antoine semblent avoir opté pour un système simplifié qui octroie une rémunération pour chaque participation aux tâches domestiques : laver la voiture, les vitres, le sol de la cuisine, etc. C'est l'homme qui paie. C'est donc Antoine, malgré les velléités d'indépendance de Winnie...
-Tu es resté longtemps avec elle?
-Jusqu'à deux heures du matin.
-Vous avez fait l'amour?
-Mais non!
-Tu n'as pas eu envie? Tu crois que je ne te vois pas quand tu la regardes des pieds à la tête, enfin plutôt des fesses aux nichons!
-Mais non...J'attends de trouver celle avec laquelle je ferai ma vie.
-Je ne te crois pas.
-Si, c'est vrai. D'ailleurs... je l'ai trouvée...mais je n'ose pas le lui dire...
Les enfants du siècle sont tous un peu fous, vilaines filles, mauvais garçons
Lorenzo est dans l’autobus 138. Il est monté à l’arrêt Moulin-de-Cage. À Gennevilliers. À l’angle du boulevard Camélinat et de l’avenue Gabriel-Péri. Dans douze arrêts, il descendra Porte-de-Clichy. Terminus de la ligne d’autobus 138. Voyageur en costume Regent Street prince-de-galles et chemise de couleur à col blanc, il est debout car, à cette heure – 18 heures environ –, sur cette ligne, il y a beaucoup de passagers, et qui parlent entre eux, évoquant les sujets du moment. L’affaire John Profumo, du nom du ministre britannique de la Guerre, qui aurait livré sur l’oreiller de la call-girl Christine Keeler des secrets d’État. L’ouverture de l’hypermarché Carrefour à Sainte-Geneviève-des-Bois. L’envoi dans l’espace de la première femme cosmonaute, la Russe Valentina Terechkova. Et, bien évidemment, l’élection, dix-huit jours après la mort de Jean XXIII, de Giovanni Battista Montini, l’archevêque de Milan, qui a choisi de monter sur le trône de saint Pierre sous le nom de Paul VI.
Tout au long du trajet, durant lequel il traverse une banlieue ouvrière, où subsistent encore quelques vergers, où pointent vers le ciel de hautes cheminées de briques laissant échapper d’épaisses fumées jaunes, où se dressent les longues barres de béton des HLM, Lorenzo a le temps de penser à la jeunesse qui est la sienne et au monde qui l’entoure.
J'ai longtemps pensé que la vie était une ronde. Que les gens se croisent et se recroisent en vertu d'un plan secret qui nous échappe. Que parfois ils se frôlent, sont à quelques mètres l'un de l'autre et ne s'en apercevant pas repartent chacun de son côté.
9-11 novembre 1989, à Berlin :
Les étreintes sont réelles, les baisers chaleureux, c'est comme si la ville entière faisait l'amour et inventait la liberté.
Ils arrivent à l’âge de la consommation, tandis que leurs géniteurs accèdent à une aisance jusque là inconnue. Le choc de deux planètes. Rencontre explosive de l’ancien et du nouveau. P 18
Elle sait que la maîtrise de la parole appartient aux filles, que les années qui s'ouvrent vont être celles des femmes. Celles de grands changements pour elles. Elle sort de la voiture non sans avoir déposé sur la bouche de Lorenzo un baiser suffisamment chaste pour qu'il n'aille pas s'imaginer qu'il va la mettre demain dans son lit, mais assez équivoque pour installer en lui un trouble tenace.
- il vous donne même un nom: les "yéyés".Une des significations du yéyé, dit-il,est : nous sommes jeunes"