Chasseurs de têtes

Je relus attentivement ces ultimes puérilités qui ressemblent à des quiz ridicules que les journaux publient l'été et qu'on remplit paresseusement sur la plage. Je n'avais pas besoin de me forcer pour répondre ; chaque fois que je me suis amusé à remplir un de ces jeux, le total de mes points m'a classé dans une catégorie moyenne : ni coléreux, ni apathique, ni dragueur ni fidèle, ni émotif ni flegmatique. J'ai arrêté le jour où, empruntant distraitement un de ses magazines à ma femme, j'ai découvert avec stupéfaction que je n'étais non plus ni clitoridienne ni vaginale mais un peu des deux.

- Je vous parie qu'on va avoir de la fondue. Dans les Alpes, ça commence toujours comme ça : la fondue, pour que les gens se mélangent.
Il perdit. C'était de la raclette.

- Mais enfin, vous ne pouvez pas faire ça, enfin, on vie en société, ça s'appelle la civilisation...
Elle ne savait pas ce que nous étions devenus ou redevenu depuis une dizaine d'années.

J'avais l'impression de commander une section dans une rizière vietnamienne. Je ne savais pas d'où j'avais sorti tout ce que je venais de leur dire, ce discours macho-guerrier à deux francs. Il ne me ressemblait pas du tout.