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Critique de nilebeh


Fermez les yeux et projetez-vous mentalement dans votre lieu de travail, là où vous passez le plus clair de votre temps. Vous fouillez dans les tiroirs, armoires, vitrines, et là, vous tombez sur des cartons que vous ouvrez, un peu surpris, puis totalement déstabilisé : vous venez d'ouvrir un carton d'ossements étiquetés à votre nom, celui de votre famille.

Fermez encore les yeux et cette fois, situez-vous dans le salon de votre enfance. Exposé sur la plus haute étagère, bien en vue, trône un crâne humain. Vous avez sept ans et durant toute votre enfance, vous avez été terrorisé par « Mary », ainsi gentiment nommé par votre père, vétérinaire, qui l'a rapporté du bush australien.

Ceci est vraiment arrivé, en 2005, à deux hommes qui n'auraient jamais imaginé partager une telle histoire.

Le second s'appelle John Danalis, il écrit ce livre pour raconter son chemin dans la culture aborigène, Wamba Wamba exactement.

Le premier s'appelle Jason, c'est un grand Noir, Aborigène stagiaire au musée de Melbourne dans le département « Indigènes ».

Nous plongeons dans une aventure extra-ordinaire, un parcours initiatique vers une culture méconnue, méprisée souvent, un cheminement vers ce qu'on est en profondeur, vers la connaissance, vers le pardon. John se connaîtra mieux, son père, le pilleur de tombes, y fera son chemin également.

John a honte d'être le fils et le neveu de deux médecins du bush qui n'ont rien trouvé à redire à exposer ainsi un crâne humain. Sa plus grande victoire sera de voir son père découvrir et respecter des gens profondément méprisés en Australie : les Aborigènes. Grâce à John, « Mary » (qui en fait est un homme) retrouve sa place, sa dignité, le respect, lors d'un retour difficile vers les siens puis une cérémonie de « ré-enterrement ».

Avec lui, nous apprenons que plus de 15000 « dépouilles » dorment dans les tiroirs des labos de sciences, dans les universités, chez les collectionneurs. Et combien d'autres dont ne sait rien?
Grippe, tuberculose, coqueluche, rougeole et syphilis : les cadeaux apportés aux natifs par les soldats anglais, les bagnards, les colons.

On découvre aussi que pour creuser des canaux d'irrigation, les Blancs ont dévasté des tumulus de pierres, coquilles, (connus sous le nom de « fours de campement »), tumulus qui abritaient des milliers de dépouilles aborigènes.

John nous fait partager ses émotions : son indignation, son irritation devant les clichés et idées toutes faites, le racisme , son amitié immédiate avec les Aborigènes rencontrés, leur simplicité, leur gentillesse à l'égard de ceux qui ont tant insulté leurs ancêtres.

Le témoignage est parfois empreint de mysticisme, le crâne et les ossements semblant être connectés à la réalité des événements et les guider. Et surtout porter malheur à ceux qui les ont ramassés. On y parle de la cosmogonie aborigène, des mythes, de l'art de la peinture sur écorce que les natifs se réapproprient.

Un livre riche, sensible, intelligent. Et une traduction manifestement de qualité. Nous découvrons avec bonheur la culture aborigène, (et pas seulement le didgeridoo et les gravures sur écorce du Musée de l'histoire de l'immigration du Palais de la Porte dorée).

Plaisir supplémentaire : le livre est beau, avec sa couverture cartonnée illustrée de plumes de cacatoès noir, cet étrange oiseau qui joue du tam-tam avec son bec, totem des Wamba Wamba !
Un grand merci aux éditions Marchialy et à Babelio pour ce joli cadeau.

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