-Je me sens seul à tel point qu'il m'arrive de penser que le temps s'est arrêté. Voyez-vous, Edouard, depuis la mort de mon mari, je n'ai plus aucun but dans la vie qui est la mienne à présent. Du moins, aucun qui n'est de sens. Croyez-vous que ma famille m'aime ?
-Cela ne fait aucun doute, madame.
-Elle me respecte, ça va sans dire, mais en dehors de ma petite fille, j'ai le sentiment que tous me craignent, alors de là à m'aimer...
-A coup sûr, madame se fait des idées.
-Pas tant que ça, Edouard, pas tant que ça.
Sur le pas de la porte, il se retourna afin de fixer un dernier regard sur elle. Celui qui lui fut renvoyé lui laissa de l'espoir. Cet espoir que l'on s'invente, celui que l'on se construit pour être certain qu'il y en aura au moins un.
- Vous n'êtes même pas actionnaire à 40 % de votre propre société et vous dites tout décider ? La seule chose que vous décidez réellement, c'est la destination de nos vacances d'été.
-Je me parlais à voix haute. C'est le privilège des gens âgés. Vous savez, lorsque l'on passe trop de temps seul, se parler est une manière de vérifier que l'on n'est pas devenu sourd.