Citations sur La Mémoire du fleuve : L'Afrique aventureuse de Jean Mi.. (21)
Mais déjà une bagarre au ras des planches, parmi les assoupis et ceux qui ont rabattu leur boubou. Le bruit sourd des coups. Un homme, à la faveur de l’obscurité, a dû passer la jambe par-dessus la femme du voisin …
— Eh là, tu te prends pour qui ?
— Je croyais que c’était la mienne
« Si tu ne viens pas aujourd’hui, je te fais sauter la paye »… Mes types gloussaient bien gentiment.
À l’époque dont je parle, le Bavongo n’a aucun besoin. S’il n’a pas de quoi acheter de pétrole, il va se fabriquer une torche, voilà tout. Travailler est pour lui une occupation fortuite à laquelle il ne se livre que pour vous rendre service. Il considère que c’est une gentillesse qu’il fait à « Jeannot », au maître – et si Jeannot ou le maître se fâche, eh bien tant pis, ça ne changera pas grand-chose.
Le chef a retiré la peau de léopard dont il s’était jusqu’alors ceint les reins. Comme un diable d’une boîte, le sexe jaillit aussitôt. Et quel sexe !… Il est de la longueur d’un bras !
Titubant comme un aveugle, il se dirige vers une des torches de résine. La verge se déploie. Des médecins à qui je raconterai l’épisode, par la suite, me diront : « crise de priapisme ». Comment expliquer pourtant le déclenchement à volonté, le fait que Moundouli se contrôle au point d’enrouler sa verge à la manière d’une trompe ?
Car – stupeur de l’assistance – elle s’enroule autour de la torche. Dernier effort de Moundouli – à se tuer : il soulève celle-ci. Les hurlements redoublent. Moundouli est sorti en emportant le feu !
Car enfin, que ce soit croyance fondée ou superstition, personne n’irait chasser sans que sa femme ait préalablement retourné la glace. Nul n’ignore que les yeux du gibier sont au fond des miroirs.
A Sangala, la réputation de l’homme blanc est entièrement à reprendre.
...
Enfin, le privilège du métis n’est-il pas de jouer sur le registre noir, quand l’autre laisse à désirer ?
- Les femmes que je t'ai données ne te plaisent pas ? Veux-tu les changer ?
- Si, elles me plaisent. Je m'entends très bien avec elles. Simplement, ma vie est comme ça, j'ai beaucoup de soucis...
Le chef voulait bien admettre. Il avait l'air de se dire, néanmoins, que je tenais moins du Noir que du Blanc car le Blanc, c'est bien connu, pense beaucoup trop.
Le chef m’a prévenu des particularités de la justice. La bouche commence par l’accessoire. Ce n’est qu’après que l’essentiel arrive. Il y a un dicton pour cela : « Le verbe est étrange, il enfante sa mère. »
Ce n'est pas un péché d'être noir, mais mulâtre... !
J'ai connu une personne , aujourd'hui adjointe au maire de Port Gentil, qui a été avalée à l'âge de treize ans par un python.
Un serpent affamé l'avait suivie dans un village de brousse alors qu'elle se rendait aux latrines. Aussitôt assommée. Car l'agression par laquelle un python neutralise sa victime est un véritable coup de boutoir.
La chance de la gosse a été que le python, trop pressé, au lieu de l'avaler par la tête, commence par les jambes. Chance supplémentaire : la petite était tombée avec les jambes écartées. Le serpent a donc dégluti un pied, une jambe, mais il s'est trouvé bloqué par l'entrejambe et il n'a pu aller plus loin.
Se réveillant à son évanouissement, la fillette se met à hurler. Les parents, les voisins accourent. Et le serpent inexpérimenté - ou fou de boulimie - a été tué. Il ne pouvait ni régurgiter ni repartir. Il était lui même prisonnier de sa prisonnière.
J'ai tiré à dix pas. L'éléphant n'est pas tombé mais, en tournant sur lui-même, il a poussé un barrissement d'une violence inouïe. Ah! ce barrissement!... Jamais aucun hurlement, en forêt, ne m'avait pareillement secoué. C'était de la douleur, bien sûr, mais un cri d'innocence surprise et, plus encore, un chant de guerre à vous glacer le cœur.