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Critique de montmartin


Des hommes et des femmes revêtus de gilets de lucioles, des laissés-pour-compte, des petits, des sans-dents, des fainéants, ceux qui ne possèdent rien, agglutinés à un rond-point autour d'un brasero. On n'avait pas soupçonné leur colère, leurs chagrins, on n'avait rien vu venir, alors la détresse avait revêtu des gilets jaunes fluo. Ils rêvaient à nouveau, ils étaient ensemble et c'étaient bien, les amitiés s'enracinaient, les désillusions sont un ciment.

« Il fallait redevenir des bêtes Les maîtres ne reculent que devant des chiens qui mordent. »

Parmi ses révoltés il y a Pierre, sa colère prend sa source dans sa lâcheté d'homme et ses faiblesses de père. Il est un connard de vigile à Auchan que personne ne regarde, comme un chien et encore les chiens on les caresse. Son enfant a consumé son amour pour Louise.

Louise est infirmière dans une unité de soins palliatifs, elle réconfortent ceux qui souffrent, ceux qui partent. Elle sait trouver les mots justes qui permettent de mener les mourants à une joie insaisissable qui permet le lâcher-prise.

Leur fils Geoffroy est un enfant de 13 ans sans personne dedans. Il sait tout ce qu'il y a dans les livres, mais il n'en parle pas parce qu'on ne lui demande jamais rien. Il ne supporte pas qu'on le touche. Il possède une mémoire impressionnante. Tout ce qui est nouveau l'effraie. Il perçoit le monde à sa façon. Seules les couleurs le rassurent. La vie de Geoffroy va changer quand il va croiser les yeux vert Véronèse de Djamila 15 ans. Elle est irradiante de beauté. Les deux enfants sont la pièce manquante de l'autre.

« Il lui montrait des étoiles que personne ne pouvait voir en plein jour, et elle riait, et elle s'émerveillait. »

Quel plaisir de retrouver la plume de Grégoire Delacourt, il nous offre ici un roman social, ancré dans notre époque. Au fil des samedis de manifestations des gilets jaunes il nous raconte l'émergence du Front national, le racisme, la montée du communautarisme l'intégration difficile des travailleurs immigrés et la colère de leurs fils. La vie des adolescentes dans les banlieues, les garçons qui les sifflent les traitent de putes. L'abnégation des personnels soignants notamment dans les services de soins intensifs, la fin de vie et surtout la peur de la différence.

« Tout le monde le sait, un groupe humain se constitue par l'exclusion d'une ou plusieurs personnes. Un groupe d'élèves c'est pareil. Ainsi les amitiés se façonnent-elles sur le dos d'un gros, d'une grosse, d'un moche, d'une moche, d'un bigleux, d'une bigleuse, d'un étranger, d'une étrangère. »

J'ai beaucoup apprécié sa façon d'expliquer ce mouvement des gilets jaunes venu d'on ne sait où. Grégoire Delacourt fait parler ces femmes et ces hommes avec leurs mots, on voit leurs réactions aux discours des politiques, leurs désillusions, leur désespoir. le lecteur a l'impression d'être au milieu d'eux. Je trouve qu'il a traité ce sujet délicat avec beaucoup de finesse.

C'est un roman d'une telle richesse avec des personnages poignants, roman initiatique et roman d'amour à la fois. L'amour de deux enfants au coeur pur, celui d'une femme pour un homme qui se meurt, celui d'une mère pour son fils différent. Un récit rempli d'humanité,de sensibilité, Grégoire Delacourt sait si bien explorer les sentiments avec une écriture mélange subtil de délicatesse et de poésie.

Merci infiniment aux éditions Grasset pour leur confiance.
#Unjourviendracouleurdorange #NetGalleyFrance

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