Au fond de moi cependant, j’avais beaucoup de sympathie pour la volatilité du prix du pétrole. J’y trouvais un écho à mes propres incertitudes. Moi aussi, la volatilité de mes impressions sur le monde m’empêchait d’y définir ma direction propre.
En résumé, j'ai pensé en rentrant dans le métro, le monde est un chemin de surprises, dont les portes s'ouvrent surtout là où l'on n'avait même pas vu de porte.
L'entreprise, c'est rationnel. Ça mesure, ça compte, ça soupèse. Comment peut-on imaginer être poète dans ces conditions? Justement, voilà que me tombait dessus quelque chose d'un peu plus volumineux que prévu. Je n'allais pas le refuser pour une vulgaire histoire de taille. On ne fait pas de la poésie à moitié. La poésie, la vie, l'imprévu, tout ça c'est du même acabit.
Quand on met un pied dans la fantaisie, elle nous mange entièrement. Un jour ou l'autre. La fantaisie est un piège dangereux. Addictif. Vous ouvrez la fenêtre et vous découvrez dans votre salon une jungle hétéroclite de personnages sans queue ni tête, alors que vous vouliez seulement prendre un peu l'air. Vraiment, je préférais me retrouver sans emploi que de recommencer à travailler, jour après jour, avec sérieux et abnégation., sans cette échappatoire.
Au fond de moi cependant, j’avais beaucoup de sympathie pour la volatilité du prix du pétrole. J’y trouvais un écho à mes propres incertitudes. Moi aussi, la volatilité de mes impressions sur le monde m’empêchait d’y définir ma direction propre.
Dans ce monde en tourbillon, certaines choses semblaient plus apaisantes. Je pensais en particulier aux lézards Timon lepidus. Ils étaient verts, couleur de l’espoir, et possédaient un troisième œil, comme beaucoup de sauriens, d’après Wikipedia. Si j’arrivais à nous en procurer, j’avais le sentiment que je résoudrais le problème de construction du building derrière l’appartement d’Henri, mais pas seulement. J’étais certaine aussi que ma vie basculerait dans une dimension plus unifiée, plus directionnelle en fait. Le lézard Timon lepidus était un poïkilotherme. C’est-à-dire qu’il avait une faible régulation thermique autonome et devait donc composer avec son environnement extérieur pour équilibrer sa température interne.
J’aimais cette nécessité de faire avec le monde. Le Timon lepidus avait besoin du soleil pour se réchauffer pendant de longues heures. Personne ne songerait à lui jeter la pierre, hormis quelques garnements de village qui s’ennuyaient pendant leur sieste. Et si moi aussi, j’avais quelque chose du Timon lepidus ? Si j’y réfléchissais bien, partout où j’allais, mon premier réflexe était toujours de m’assurer de trouver une roche ensoleillée de fantaisie sur laquelle je pourrais m’allonger pour me remettre du sérieux du monde.
Benjamin s’est levé avec les deux mains appuyées sur le bureau et nous a regardés tour à tour. Farid a baissé les yeux. Moi j’oublie toujours.
Il y a quelques semaines, nous sommes tombés sur le guide du parfait orateur que Benjamin a reçu à sa dernière formation manager. Le guide conseillait « Regardez tour à tour chacun de vos interlocuteurs dans les yeux, pendant quelques secondes ».
Depuis, nous nous efforçons de rendre l’exercice plus stimulant en regardant partout sauf vers Benjamin lorsque c’est notre tour d’être scruté. L’idée, c’est de le mettre en situation de progrès.
J'ai écouté avec attention. Je connaissais bien ces publications, qui comportaient des graphes multicolores que j'utilisais dans mes collages.
La fantaisie est un piège dangereux. Addictif. Vous ouvrez la fenêtre et vous découvrez dans votre salon une jungle hétéroclite de personnages sans queue ni tête, alors que vous vouliez simplement prendre un peu l'air.
Au fond de moi cependant, j'avais beaucoup de sympathie pour la volatilité du prix du pétrole. J'y trouvais un écho à mes propres incertitudes. Moi aussi, la volatilité de mes impressions sur le monde m'empêchait d'y définir ma direction propre.
Si j'y réfléchissais bien, partout où j'allais, mon premier réflexe était toujours de m'assurer de trouver une roche ensoleillée de fantaisie sur laquelle je pourrais m'allonger pour me remettre du sérieux du monde.