AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de 4bis


Sur le bandeau qui orne la couverture sont dessinés, sur fond de papier écolier à petits carreaux, cinq carrés de différentes tailles. Au centre de leur surface, des indications chiffrées en m2 et à côté des noms de ville. Et la légende " surface que j'aurais pu acheter avec le budget dédié à ma psychanalyse". Comment aurais je pu résister à une telle accroche ? Des informations qui n'ont rien à voir entre elles sont réduites à l'état de données. Voilà qui suffit à leur conférer une légitimité à cohabiter, quelle idée ! Et tout le livre alterne ainsi infographies et notes plus ou moins en rapport en s'organisant autour de grandes thématiques. Derrière le choix de chaque information, il y a une quête identitaire assumée, l'idée que cette "micro data" peut autant dire sur ce qu'est un homme que le brassage algorithmique du big. C'est déjà tout un programme. Mais bien sûr, décider de mentionner le nombre d'ongles coupés ou rongés, de pensées de drames potentiels par an, de fois où l'auteur a dit merci (397850) ou non merci (759790) est déjà une attaque en règle contre le projet scientiste de laisser parler les chiffres. Derrière leur juxtaposition, il y a une volonté malicieuse, poétique ou subvertive : la rencontre d'un parapluie et une machine à coudre sur une table de dissection, façon 21e siècle. La précision toute mathématique des données met fatalement en lumière l'impossible décompte, la vanités d'espérer effectivement cartographier exactement l'impression de vivre dans le présent, le passé ou le futur selon les âges de la vie, la proportion entre les fois où le narrateur a ri, fait rire. Et ce fossé entre la volonté affichée et l'impossibilité d'y parvenir est aussi un révélateur identitaire. C'est un livre concept, vertigineux et amusant qui invite à tester incessamment la distance que prend le lecteur avec son contenu, qui invite à projeter ses propres chiffres et décomptes. Qui fait entrer dans une forme d'intimité parfois plus inconfortable que certaines autobiographies aussi apparemment cliniques et aseptisées que soient les donnés fournies.
Commenter  J’apprécie          70



Ont apprécié cette critique (6)voir plus




{* *}