Je voulais te séduire, t'emmener avec moi, te torturer, te violer et abandonner ton cadavre dans un fossé.
J’avais longtemps subodoré qu’il était amoureux soit de moi soit de ma meilleure amie. Son inquiétude pour moi et sa présence dans mon quartier m’éclairaient sur le sujet.
J’étais ravie.
Presque autant que si je m’étais coincée les doigts dans une porte avant de m’électrocuter avec un grille-pain.
Je n’étais pas sûre de comprendre ce que mamie voulait dire par « en avoir besoin » et il était heureux que je ne sois pas diabétique pour pouvoir ingurgiter une telle quantité de guimauve. Barbara Cartland était à la littérature ce que Mc Donald était à la diététique. Facile à avaler, sans surprise, engluant le cœur et provoquant le ramollissement cérébral.
C’étaient des livres capables de vous faire un lavage de cerveau sans avoir recours à la violence.
« Tu te souviens ce que je t’ai dit lundi quand on s’est vus ? »
Silence. Je me rassis sur mon lit en attendant la suite.
« Je veux te séduire, t’emmener avec moi, te torturer, te violer et t’assassiner… »
Je frissonnai.
« …là c’est la première étape : Séduction ! »
Je levai les yeux et regardai le ciel par la grande baie vitrée qui me faisait face. Il était d’un bleu profond et lumineux.
C’était aussi accepter d’avoir été quelqu'un d’autre, ailleurs, avant, d’avoir pu accomplir des actes que chaque fibre de votre corps réprouvait, d’avoir pu vivre des moments si horribles que vous ne pourriez plus jamais fermer l’œil.
Un nuage porté par les vents d’altitude s’étira dans l’azur.
C’était aussi accepter d’avoir vécu des choses si belles et si fortes mais à tout jamais perdues.
Elle est riche ? me demanda-t-il presque en silence.
- Sans doute.
- Autrichienne ?
- De Linz. Elle te plaît ?
- C'est un joli jouet."
Ses yeux pétillaient.
"Je te l'offre ?"
Il me sourit. je retournai vers ma petite fleur des champs. Il me suivit. Je fis les présentations.
"Je vous présente Côme. Mon frère."
Un sourire timide illumina son visage de petite fille sage. Elle ne savait pas encore qu'elle était morte.
« Je voulais te séduire, t’emmener avec moi, te torturer, te violer et abandonner ton cadavre dans un fossé. »
Je ne retins ni son titre, ni sa filiation, à peine son nom, juste Nebel. Elle me présenta à lui. Il me sourit. Je perdis conscience de ce qui m’entourait.
Je voyais les muscles de sa mâchoire se contracter. Je ne savais pas quoi répondre. Il se tourna vers moi. Je tombai corps et âme dans ses yeux.
J'ouvris les yeux. J'étais étourdie. Elle avait ma vie, j'avais ses sentiments, nous avions mon corps. Elle était moi, j'étais elle.
Sa douleur était intense, violente, omniprésente. la douleur sans nom du supplice et une douleur obsédante et nommable.
Nebel