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Critique de hcdahlem


Les démineurs doivent pouvoir compter les uns sur les autres

En explorant une page méconnue de l'immédiat après-guerre, le travail de déminage des côtes méditerranéennes, Claire Deya nous offre un roman poignant, entre règlements de compte et fraternisation, entre collaboration et justice.

Alors que la Seconde guerre mondiale s'achève, les derniers soubresauts du conflit continuent de marquer durablement les esprits. Sur la Côte d'Azur, l'ambiance est bien loin du farniente, car les bombardements ont laissé des traces béantes et les plages ont été défigurées et minées. Fabien a quitté le maquis pour prêter main-forte aux équipes qui chaque jour risquent leur vie pour nettoyer le littoral. À ses côtés, des volontaires plus ou moins volontaires et des prisonniers allemands. Contrairement aux accords de Genève, ils sont mis à contribution pour réparer ce que leur armée a souillée. Parmi eux, Lukas et Hans qui, au-delà des promesses de réduction de peine, voient dans ce travail une opportunité de prendre la fuite.
Quant à Vincent, s'il se jette à fond dans ce travail si risqué, c'est qu'il a déjà tout perdu. Ariane, l'amour de sa vie, a disparu. Mais il veut encore croire qu'elle est vivante et consacre tout son temps libre à tenter de la retrouver dans ce chaos. Il veut s'approcher des prisonniers allemands qui ont pu la côtoyer, car elle travaillait au château des Eyguières où l'occupant avait installé son quartier général. Engagée dans la résistance, elle avait pour mission de gagner la confiance des officiers et de leur soutirer des informations. Mais elle voudra aller au-delà de cet objectif et finira par disparaître sans laisser de traces, ou presque. Car Vincent caresse l'espoir de «savoir enfin ce qui était arrivé à Ariane pendant l'Occupation, pourquoi elle avait disparu, où elle était.»
Dans cette France en pleine effervescence erre une autre âme en peine erre, Saskia. Revenu des camps de la mort et passée par le Lutétia où on lui conseille de faire profil bas, elle retrouve sa maison familiale occupée par des bourgeois sûrs de leur von droit. En attendant de pouvoir prouver sa bonne foi, elle accepte la proposition de Vincent de l'héberger chez lui.
Claire Deya va alors suivre les parcours respectifs de ses personnages dans un pays qui se cherche, entre profiteurs qui essaient de sauver leur situation et victimes qui tentent de faire reconnaître leurs droits, entre ceux qui ont soif de vengeance et ceux qui essaient de tourner la page très sombre de la guerre.
Tout au long des opérations de déminage, parfaitement détaillées et documentées, on va se rendre compte des nombreuses implications que ce genre de travail implique, à commencer par une confiance absolue dans les équipes à l'oeuvre. Si c'est un peu contraints et forcés que Français et Allemands se retrouvent sur le même terrain, il leur faudra bien s'entendre pour rester en vie.
C'est dans ce climat explosif, au sens premier du terme, que pour Vincent et Saskia de nouveaux éléments vont apparaître sur le chemin difficile de leur quête respective.
Je l'ai dit, cette page d'Histoire est admirablement documentée, ajoutant au romanesque la force du témoignage, l'émotion du vécu. Un travail de mémoire remarquable qui entre en résonnance avec l'actualité brûlante et la multiplication des actes antisémites. Et qui me pousse à conclure avec la dernière phrase du discours prononcé à l'UNESCO par François Heilbronn au nom du Mémorial de la Shoah: «Seules l'éducation, la science et la culture nourries par un projet universel et humaniste permettront que notre promesse faîte il y a 79 ans aux rescapés juifs du plus grand génocide de tous les temps, le «Plus jamais ça!», retrouve son sens et sa réalité.»

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