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Critique de CDemassieux


« Ils voulaient prendre du bon temps, mais ils ressemblaient aux enfants qui jouent dans les rues ; ils voyaient leurs compagnons disparaître l'un après l'autre – écrasés, mutilés, détruits – mais n'en continuaient pas moins de jouer » (Note de l'auteur).
Pour ceux qui ne connaissent pas bien la vie de Philip K. Dick, ce fut un homme tourmenté durant toute son existence et grand consommateur de psychotropes. Et si K. Dick ne se reconnaît dans aucun personnage – affirmant par ailleurs qu'il est le roman –, il n'en reste pas moins vrai que ce récit puise dans une authenticité autobiographique.
Et pour exprimer cette authenticité, K. Dick a recours à Fred/Bob – personnage duel et schizophrène –, un agent infiltré qui se laisse entraîner en goûtant à la Substance Mort et dont on suit la chute.
Hallucinations, paranoïa, tourments, regrets, autant de choses qui égrènent ce roman, dont la noirceur brute provoque une lecture angoissée. Roman publié alors que K. Dick allait avoir cinquante ans, l'heure des bilans… ? Quelques années à peine avant sa mort, survenue en 1982.
La science-fiction, genre privilégié de l'auteur, est ici presque imperceptible ; elle apparaît subrepticement çà et là, notamment à travers la technologie – voir les complets brouillés que portent certains agents pour garder l'incognito. Le cœur du récit c'est la toxicomanie et ses avatars. Ce qui fait de ce roman une descente nauséeuse aux enfers, sans autres flammes que celles des cerveaux grillés par la dope.
Comme dans Ubik, le questionnement sur la réalité des faits et des êtres est permanent. K. Dick brouille toujours les pistes, tel le génial esprit brouillé qu'il était lui-même.
Enfin, Substance Mort est une fantasmagorie aussi sale que désespérante, et surtout : toxicomaniaque jusque dans l'écriture désordonnée et sans fioritures. Tout se perçoit « en un miroir obscurément », est-il dit dans le texte, reprenant une phrase de saint Paul.
« Des idées il n'en aura plus aussi longtemps qu'il vivra. Il ne lui reste que les réflexes. Et tout ça n'est pas accidentel : on l'a voulu ainsi. Et nous traînons ce mauvais karma avec nous. Je le sens peser sur moi, comme un cadavre », dit un autre personnage, comme une adresse à la société américaine, policée mais gangrénée par la drogue, et qui devrait porter le poids de ce fléau dont elle est, à bien des égards, responsable. Mais ce n'est pas le lieu pour en parler…



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