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Critique de myrtigal


Ah que j'aime ce genre de conte. Et que j'aime la plume de Diderot.
Comme avec Supplément au voyage de Bougainville que j'ai lu il y a peu, encore une fois, Diderot réussit à susciter en moi une foule de questions de réflexions. Mais n'est-ce pas le propre des contes philosophiques ? Divertir tout en faisant réfléchir tout à fait en même temps ? Ces deux effets sont entièrement imbriqués et c'est ce que j'aime particulièrement et dont la magie opère sur moi chaque fois.
Ici le thème sur lequel Diderot nous propose de réfléchir c'est la notion de justice. Sous la forme d'une discussion familiale, et attention pas n'importe quelle famille : les Diderot !
En revanche je n'ai pas réussi à savoir si ce choix était réellement autobiographique ou totalement fictif mais bon qu'importe (la magie des contes !). Donc le père Diderot va faire, en compagnie de ses trois enfants ; la soeur, Denis et le frère chanoine, le récit d'une anecdote de son passé. Une situation fâcheuse dans laquelle il s'est retrouvé et qu'il a soumis à un grand dilemme moral. Aura-t-il dû, ou pas, respecter les dernières volontés d'un défunt au risque de déshériter d'honnêtes et pauvres membres de la famille et faire hériter un méchant ?
Une question sur laquelle la famille aura beaucoup de mal à se mettre d'accord, mais où chacun exposera son point de vue, et c'est bien sûr le jeune Denis qui se démarquera le plus de sa famille : exalté, passionné et révolté, il n'accepte pas l'hypocrisie de la justice qu'il nie les évidences au lieu de les voir. Car à partir du cas du testament ce sera l'occasion de débattre de la notion même de justice et de son fondement ; à savoir qu'elle est la même pour tous. Mais est-ce réellement juste ? le petit Denis nous démontre que non, le sage père — et les divers invités qui se joindront à la conversation — arguent le contraire, que le cas par cas n'est autre que le commencement de toutes les dérives. Et on sent bien qu'ils ont raison, et que si la société peut espérer faire corps et même coexister, il faut des lois communes. Et pourtant ce qu'avance Denis ; non pas se plier à la froide et imparfaite institution mais se fier plutôt à ses sens et à la raison du coeur – semble si évident et si naturel qu'on en vient à se demander comment faire coexister ces deux vérités ? Laquelle est supérieure ? le bien commun au détriment de certains ou le cas seul au détriment du bien commun ? Immense et vaste question.
Toujours dans un style dynamique porté par cette forme du dialogue intégral terriblement efficace permettant de confronter directement les points de vue et au travers de l'usage de l'anecdote qui permet d'aller du particulier vers le général, Diderot donne encore à réfléchir sur nos moeurs, sur notre société, et bien que ce ne soit qu'un conte on ressort de là avec beaucoup de questions dans la tête.
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