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Critique de Alfaric


Vaut pour les 2 tomes : les éditions Glénat se sont lancées dans un chouette projet de démocratiser à nouveau les oeuvres d'H.G. Wells, et cette bande dessinée de Dobbs, Vicente Cifuentes et Mateo Vattani est une adaptation fidèle de son roman mondialement connu "La Guerre des mondes" ! Niveau graphismes les dessins de Vincente Cifuentes assisté aux couleurs de Matteo Vattani sont plaisants, mais ils ont leurs qualités et leurs défauts… Les qualités ? Les personnages sont réussis et de découpage est dynamique… Les défauts ? Les Martiens sont un peu trop inspirés de succès hollywoodiens bien connus, les soldats sortent tous du même moule du bidasse bodybuildé, et les arrière-plans sont un peu léger…

Normalement tout le monde doit connaître l'histoire qui a été tellement reprise qu'elle en est devenue un classique : en 1894, les Martiens débarquent dans le Surrey et les autorités britanniques sont impuissantes à stopper l'invasion et la destruction de l'Angleterre avant que les orgueilleux envahisseurs sûrs de la supériorité de leur civilisation ne se fassent rattraper par les dures lois de la nature… Mais en fait il s'agit de littérature du réel et non de littérature de l'imaginaire : nous sommes dans un pamphlet contre l'impérialisme britannique car les génocides effectués par les conquérant Martiens dans le Surrey sont le reflet des génocides effectués par les conquérants anglais en Tasmanie. D'ailleurs ces derniers ont poussé le vice jusqu'à organiser des safaris façon chasses du Comte Zaroff sous prétexte que les Aborigènes n'étaient pas des êtres humains… le suprématisme est le cancer de l'humanité : dès que vous l'identifiez combattez-le de toutes vos forces, sinon nous sommes tous foutus par avance ! Car c'est bien montré par les humains qui de la science des martiens n'obtiennent que de nouvelles armes de destruction, avec un parallèle entre la poupée brûlée par les conquérants aliens et la poupée brûlée par les savants terriens : nous ne sommes que des marionnettes à utiliser puis à jeter pour les crevards suprématistes. Sinon on retrouve le frisson existentialiste commun à tellement d'oeuvre à cheval sur les XIXe et XXe siècle et à contre-courant de l'idéologie occidentale : l'homme n'est plus l'être créé par Dieu à son image qui règne sur une planète créée pour lui et placée au centre de l'univers, mais une espèce comme les autres qui apparaît, évolue et disparaît comme les autres (ah ça, l’auteur s’en donne à cœur joie contre les grenouilles de bénitier ! ^^)…
On se demandera donc par quelle infamie un tel ouvrage d'engagement ancré historiquement s'est vu catégorisé « jeunesse » par les commissaires littéraires franco-français : leur inculture en cessera jamais de m'étonner, donc je ne cesserai jamais de m'insurger contre leur débilité !

Comme dans "La Machine a voyagé dans le temps", tout est raconté à la première personne mais le narrateur n'est ici que le spectateur passif et impuissant des événements (je vais à la rencontre des Martiens, je mets ma famille à l'abri, je vais de nouveau à la rencontre des Martiens mais je culpabilise et donc je repars à la recherche de ma famille… Ce n'est pas très cohérent ni très intéressant tout ça, mais l'auteur envoie le narrateur pour être le témoin des événements qu'il veut dénoncer au lieu de développer des thématiques survivalistes). du coup le récit apocalyptique manque cruellement de peps, car l'auteur place ses idées avant son histoire…. Son imagination d'avant-garde aurait pu se marier aux codes du roman populaire (H.G. Wells + Alexandre Dumas = rhââ lovely), et dans ce cas je serais mort et ressuscité au paradis des geeks, mais malgré ses convictions socialistes H.G Wells n'est jamais arrivé à se débarrasser des préjugés de sa classe : il a toujours expliqué qu'il écrivait des essais romancés et non de véritables romans, car le roman c'est divertissant donc à vouer aux gémonies selon la doxa de l'intelligentsia… Plus les choses changent et plus elles restent les mêmes : les petits cercles intellos prout prout héritiers des salons d'Ancien Régime continuent d'opposer « speculative fiction » digne d'intérêt car appartenant à la « vraie littérature », et « science-fiction » sous-genre populaire destiné à meubler les pertes de temps mensuelles des masses décérébrées (sic)… Si quelqu'un utilise le terme « speculative fiction », ou « roman graphique » dans un autre domaine, vous pouvez être sûr à 100% d'avoir affaire à un bobo hispter qui essaye de se placer au-dessus du commun des mortels…


PS1: je comprends désormais la haine viscérale que porte moult auteurs anglais de SFFF entre JRR Tolkien, car selon eux la SFFF lancée par des hommes de convictions progressistes a sur le fond reculé de plusieurs siècles en arrière avec les convictions chrétiennes et conservatrices du créateur de la Terre du Milieu…

PS2: hommes-bête, guerres des mondes, voyages dans le temps… j'ai retrouvé tout cela chez David Gemmell le maître anglais de l'heroic fantasy : décidément la SFFF anglaise est plus forte que jamais, alors que la SFFF française vit toujours sous le joug des commissaires culturels de mes couilles...
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