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Critique de JeanPierreV


e suis bien incapable de dire comment j'ai connu ce livre qui figurait depuis des mois dans la liste toujours plus grande des ouvrages que je souhaite découvrir, afin continuer à voyager jusqu'au jour du grand départ...
Emmanuel Dongala, que j'ai découvert avec ce titre m'a transporté au coeur de l'Afrique Noire...non pas le noir couleur de peau, mais le Noir de la corruption, de la condition des femmes, de l'obscurantisme des sorciers, des superstitions, des viols, des mariages forcés, des veuves que la belle famille spolie et jette à la rue, le noir des dictateurs brassant des milliers, presque des millions de francs CFA pour les meilleures bouteilles de champagne et méprisant une population qui tous les jours trime pour manger. C'est aussi le noir du Sida, des magouilles..
Photo de groupe au bord du fleuve, (il faudra attendre les dernières pages pour en comprendre le titre) est le film de quelques jours de la vie de quelques femmes africaines, l'histoire d'une grève, d'une répression.. Méréana, Ma Bileko, Iyissou, Laurentine Paka, Anne-Marie Ossolo, Moyalo, Moukiétou, Batatou, et quelques autre ont toutes été contraintes par les hasards de la vie, les séparations ou les viols, de se retrouver chaque matin au bord du fleuve afin de réduire en gravier, au marteau, les blocs de pierre qu'il charrie et laisse sur les rives.
Il leur faut un jour sous le soleil pour obtenir un sac de gravier, vendu dix mille francs..un sac que des marchands revendent cinquante mille francs au dictateur qui se fait construire un aéroport international...Parce qu'elles sont des femmes qui ont chacune le besoin personnel de gagner un peu d'argent, elles sont les premières victimes du principe partagé à tous les niveaux du pays : gagner toujours plus de fric sur le dos des plus faibles et vivre dans l'opulence en les exploitant, en ignorant leurs souffrances. Et ceci si possible bien sûr, grâce à la charité internationale, aux dons et crédits octroyés au titre du développement. Pourquoi donc leur payer le gravier plus cher ?
Dans ce système politique et social, l'homme a tous les droits : celui de répudier sa femme, de violer des gamines... mais bien sûr aucun devoir...Une femme n'a pas d'enfant ? Il est impensable que l'homme soit stérile, c'est la faute de la femme qui sera alors jetée à la rue ! Et"....un mari, comme un chef, ca se respectait."
Cette grève sera réprimée par la police qui tirera et tuera... ce qui nous donne l'occasion de découvrir l'hôpital, le système de santé, le fonctionnement du régime policier, la torture.
Je vous laisse découvrir la suite, faite de manipulations, de pressions, de promesses et de bassesses et j'en passe.
Vont-elles obtenir satisfaction
Méréana est la porte parole de ces femmes grévistes. Elle a été jetée à la rue par son mari député pro-gouvernemental. C'est elle la narratrice du livre. Elle prend donc le lecteur à témoin en le tutoyant, tout au long du livre. Cette forme narrative nous interpelle, nous indigne, nous fait aussi souvent sourire.
Chaque matin de grève, au réveil Méréana écoutera la radio locale, forcément gouvernementale, dont l'auteur retranscrit les informations en début de quelques chapitres : Sourires ou indignations garantis.
Critique d'une certaine Afrique, celle de ces dictateurs, ce serait trop long de les citer, "Photo de groupe au bord du fleuve" est aussi un plaidoyer pour nous faire prendre conscience de la condition de certaines femmes, celles qui n'ont pas pu s'élever ou qui sont tombées, celles qui ont créé des entreprises, celles qui sont proches du pouvoir...Critique féroce de cette Afrique dans laquelle tous les modes de gouvernement cohabitent, comme cohabitent des femmes multimillionnaires, chefs d'entreprises dynamiques et des femmes au bas de l'échelle sociale.
Mais rien n'est acquis : si les ascensions sont rapides, elles peuvent être suivies de chutes encore plus rapides.

Lien : https://mesbelleslectures.co..
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