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Critique de JeanLouisBOIS


Le Phénomène le Pen.

Dominique Albertini et David Doucet nous fournissent une récapitulation journalistique sur le Front National (FN) de 1972 à 2012. Ce livre pourrait se présenter comme une biographie politique de Jean-Marie le Pen, tant l'omniprésence du leader du parti s'avère écrasante: qu'il s'agisse des choix stratégiques ou tactiques, qu'il s'agisse de l'organisation interne ou des préférences injustifiées, qu'il s'agisse de la mise en marche d'une dynastie.

Le FN provient de l'extrême droite radicale. Il est né d'une scission d'un groupuscule appelé Ordre Nouveau. le Pen, ancien député poujadiste, a su abuser ses anciens alliés pour prendre le contrôle du mouvement radical Front National et fédérer l'ensemble des forces de la droite dure en quelques décennies. Sur ce plan, rien de nouveau. Les résultats du FN aux différentes élections marquent son implantation durable, souvent le succès de ses idées et surtout de la force de persuasion de son « leader naturel » Jean-Marie le Pen.

Le FN demeure un parti politique très atypique. Il apparaît en fait construit autour d'un seul homme qui impose sa volonté, ses idées, ses sympathies fluctuantes (et surtout ses antipathies) et qui n'hésite pas à diviser pour mieux régner. Il compte peu de militants et un nombre restreint de cadres. La personnalité de Jean-Marie le Pen semble suffire à définir la ligne (souvent chaotique) du parti grâce à des propos régulièrement outranciers, diffamatoires, xénophobes, antisémites, d'un comique malsain. A tel point que le FN est devenu un parti infréquentable, ce qui explique en partie sa diabolisation…du moins pour ceux qui ont voix au chapitre médiatique, pas pour les exclus, toujours plus nombreux, du système et qui ont l'impression d'être mieux représenter par un parti qu'ils ressentent exclu comme eux.

Le FN possède une dernière caractéristique : il évolue en devenant une sorte de parti dynastique. En effet, c'est la fille cadette du fondateur, Marine, qui le remplace et son gendre qui occupe des fonctions éminentes dans les rouages du parti, sans parler de sa petite fille, Marion, la benjamine de l'Assemblée Nationale. Même s'il est marqué extérieurement par un fort contenu idéologique, le FN n'est pas entièrement structuré par cette base théorique. Il demeure un parti de « copains », de gens qui se connaissent bien localement, s'apprécient et pour qui les rapports interindividuels, la convivialité sont plus importants et plus profonds que les intérêts à long terme du parti lui-même. D'où le peu d'importance des égarements foutraques, des combats d'arrière-garde ressassés encore par son chef-fondateur et qui n'ont que peu d'importance pour ses électeurs, si ce n'est que de se démarquer de « l'establishment ».

En fermant ce livre retraçant la trajectoire du FN jusqu'en 2012, un bilan de quatre décennies, on ne peut s'empêcher de se poser la question : le FN est-il d'abord un parti politique ? Certainement en ce qui concerne le contenu idéologique auquel on le rattache mais alors il reste très archaïque : rôle monarchique et charisme écrasants du chef, peu de militants, peu de cadres, importance du non-dit, de l'évidence, toujours sous-jacents dans les discours, tentative d'établir une dynastie, une sorte de « filiation par le sang ». le seul bémol à cette évocation vivante et événementielle de ce parcours reste les convictions de gauche des auteurs (journalistes à Libération et aux Inrockuptibles) renforcées s'il en était besoin par une préface d'un animateur de la Gauche Populaire. On peut toujours craindre dans ce cas de figure une dérive insidieuse, même inconsciente, vers une thèse préexistante au sujet abordé. Que dirait-on de l'évocation du parcours du Front de Gauche par un journaliste du Figaro ?
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