C'était le tout début des années soixante, les grands ensembles et l'avenir radieux, la confiance retrouvée et la prospérité à perte de vue, le chauffage central et la télévision dans chaque foyer, la machine à laver et le congélateur, la cuisinière à gaz et l'automobile de marque française dont le mari astiquait avec ardeur la carrosserie chaque dimanche matin, en lieu et place de la messe d'antan, tandis que sa femme s’émerveillait des fonctionnalités inédites de son tout nouveau robot-mixer. L'apogée de ce qui, sans ironie, a rétrospectivement porté le nom de Trente Glorieuses.
Que retient-on exactement de ce qu’aura été sa propre famille avant que soi-même on ait été en mesure de commencer de s’interroger sur le sujet, avant d’être comme cloué sur place par cette forme de stupeur qui survient sans prévenir à ce moment de l’enfance qui en marque aussi la fin ?