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Critique de Wazlib


*Entends la nuit* est un roman de fantasy urbain écrit par Catherine Dufour (ou fantastique, selon votre bon vouloir) et publié chez L'Atalante en 2018. Vantée, j'ai envie de dire "comme d'habitude", par la Salle 101 lors de sa chronique, Catherine Dufour a sérieusement éveillé ma curiosité sur un récit qu'elle décrit elle-même comme un "anti-Twilight". Allons bon, je ne suis pas le plus grand admirateur de la saga de vampire, loin s'en faut, mais n'ai jamais trop apprécié non plus les critiques acerbes de cette cible trop facile. Si des dizaines de problématiques ressortent de ce genre d'intrigues (on peut tout de même sérieusement se demander s'il est sain de fantasmer sur des malades mentaux à la Christian Grey), j'exècre les victimisations fréquentes constatées sur les différents réseaux sociaux littéraires et qui sont objectivement omniprésentes. On est tout de même à une drôle d'époque, quand on commence à foutre des "trigger warning" à tout bout de champs, à condamner des auteurs populaires ayant diffusé pendant des années de "bonnes ondes" pour des propos au pire maladroits, à saisir le moindre point de vue pour le distordre en son enfer martyrisant personnel. Twitter, la course aux écorchés vifs. Mais je m'écarte.

Cette fois-ci, vous vous en douterez, c'est réussi. Mais ce récit ne fait finalement pas de cadeaux, même dans ses ambitions les plus simples.
Critique des récits twilight-like, oui, mais ça n'apparait pas si évident (et quelques critiques trouvées ici et là en témoignent). Il faut prendre gare: c'est un roman féministe et c'est dans son orientation littéraire qu'il faut chercher les réponses. Car Myriam, finalement, succombe au charme de son minéral amant, et on ne passera pas sur les poussées libidineuses soudaines et répétées (partagées, bien sûr). Mais c'est dans son réalisme et son approche que le livre s'écarte grandement de ces oeuvres pour mieux le critiquer; notre héroïne ne se laisse pas faire et compte bien le montrer. Dans cette capacité de résilience et de combativité, Myriam fait effectivement figure de battante face à des enjeux toujours plus titanesques.
A bas le côté fleur bleue, également. Ici les considérations sont nettement plus terre-à-terre et donnent lieu d'ailleurs à quelques dialogues succulents (le phrasé de Duncan vs le franc-parler de Myriam, ça vaut de l'or...). On rajoutera à cela que malgré les quelques descriptions flatteuses du fameux Duncan, je ne suis pas passé sur la description du processus permettant de "faire un corps"...

L'enjeu fantastique est également agréable: le choix du lémure, sacrément surprenant, est bienvenu. Permettant d'explorer la belle ville de Paris et d'affiner des concepts encore inédits (en tous cas pour moi), le lémure aura également ce contexte terriblement anxiogène d'être ubiquitaire. Si vous avez déjà entendu des bruits dans les murs, alors vous en aurez pour votre argent...
Et Catherine Dufour se permettra en plus de donner dans la critique sociale, à peine métaphorique, et toujours efficace. Que l'on décrive les échelons militaires de la Z où le peuple inorganique des bas-fond de la vie, cela fait mouche.

Reste cette fin, qui à l'image du reste du livre, n'est pas évidente. C'est à la fois jouissif et frustrant: enfin on quitte ce calme ouaté entourant tout le récit et on bascule dans un survival horror éprouvant, mais on rentre aussi dans une atmosphère brouillonne et confuse. J'ai effectivement eu quelques difficultés à me repérer dans le passage des catacombes (ça a donné un "charme", cela dit...) et à suivre Myriame dans ses vrilles émotionnelles. Et difficile, d'ailleurs, de mettre un fin mot sur les idées de notre héroïne à la fin du roman, tant écrire c'est tromper...

Bref, difficile de vous conseiller quoi que ce soit. *Entends la Nuit* est un roman faussement facile, tant dans ses ambitions que dans sa construction et il saura faire réfléchir son lecteur. Pas toujours enthousiasmant, il en reste une oeuvre étonnante détonnant dans le paysage fantastique actuel.
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