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Critique de marina53


Marseille, de nos jours. Trois lycéens ont un devoir d'histoire à rendre sur les camps de concentration. Tandis que l'un propose d'aller sur internet, Alex, lui, a une meilleure idée : rendre visite à son arrière-grand-père, Andreas, qui y a survécu. Et ce, même s'il ne connaît pas beaucoup son passé. le jeune homme prévient aussitôt ses amis : le vieil homme est froid et acariâtre. Et de ce fait, l'accueil est plutôt glacial. Mais dès que les trois lycéens commencent à lui poser des questions, le passé ressurgit...
Berlin, décembre 1932. Dessinateur publicitaire dans une grande entreprise, Andreas est un jeune homme à qui tout sourit. Son patron vante son travail et il est entouré d'une joyeuse bande d'amis, tous homosexuels, avec qui il aime échanger autour d'un bon verre. Outre les blagues et les conquêtes de chacun, il y est aussi question de politique, notamment de la montée en puissance du parti nazi d'Hitler et du sort réservé aux Juifs. Aucune crainte à avoir : aucun d'eux n'est Juif. Lorsqu'un ami communiste s'inquiète du sort qui pourrait être réservé aux homosexuels, là encore, Andreas et ses amis ne semblent pas s'en effrayer car Röhm, à la tête des SA, n'est-il pas lui aussi homo ? Une mise en garde que cette bande d'amis aurait dû prendre au sérieux...

Certes, il y a eu la Shoah, mais quid du sort des invertis, autrement dit les homosexuels, dans les livres d'histoire ? Des homosexuels considérés pendant des années comme des criminels, des malades qu'il fallait soigner, et qui se sont retrouvés eux aussi persécutés, enfermés dans des camps de concentration et exécutés, et cela même avant les Juifs. Des camps qu'ils avaient, pour certains, construits. Dans cet album, Michel Dufranne nous offre un pan de l'histoire méconnu et passionnant. L'on suit Andreas, insouciant et plein de vie, depuis ses années brunes et festives à aujourd'hui en passant par ses années noires où il fut enfermé et torturé et ses années de larmes. Aujourd'hui devenu un vieil homme aigri et amer, il porte toujours en lui les souffrances et les stigmates de ces années. Un récit poignant, révoltant et riche, traité avec une grande justesse. Graphiquement, le trait élégant et réaliste de Milorad Vicanović-Maza sied parfaitement à ces ambiances, festives au début puis beaucoup plus sombres. Les couleurs éclatantes du présent s'éclipsent pour laisser place à un lavis monochrome, seul le rose du triangle jaillissant.

À noter qu'il aura fallu attendre 1994 en Allemagne pour que l'article qui pénalisait l'homosexualité soit aboli (1982 pour la France).
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