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Critique de Titine75


La petite ville paumée du Midwest nommée Baker ne se remettra jamais du passage de John Kaltenbrunner en son sein. Des récits, des légendes circulent sur ce personnage hautement controversé. Une chose est néanmoins sûre : John Kaltenbrunner a mis la ville sens dessus dessous. Pire, il fit de Baker une succursale de l'enfer. Mais qui est John Kaltenbrunner ? Pourquoi créa-t-il un tel cataclysme ? Ce sont les torche-collines, les éboueurs, qui racontent l'histoire de cet homme qui changea leur vie.

Je m'en tiens à ce résumé court pour ne pas déflorer le récit et parce qu'il est impossible de synthétiser ce roman foisonnant. Tristan Egolf écrivit son livre à 24 ans. Venu de Pennsylvanie, il ne trouva aucun éditeur aux États-Unis pour publier son premier roman. Il vint en France où il rencontra Marie Modiano qui, avec l'aide de son père, fit éditer le texte de Egolf. Sans le hasard d'une rencontre, la littérature aurait été privée d'un chef-d'oeuvre.

« le seigneur des porcheries » (sous-titré « le temps venu de tuer le veau gras et d'armer les justes ») est une saga, une fresque consacrée à un anti-héros hors-norme : John Kaltenbrunner. C'est un personnage totalement barré comme presque seule la littérature américaine sait en créer. Kaltenbrunner est le petit cousin d'Ignatius Reilly, le fils caché d'Arturo Bandini. le livre nous raconte sa vie de poissard à Baker. Les pires calamités vont s'abattre sur lui, une communauté entière semble décidée à lui pourrir la vie. Pourtant Kaltenbrunner ne demande que l'anonymat et la tranquillité. Il est à la fois brillant (à 9 ans il a retapé et est à la tête de la ferme de feu son père) et socialement inadapté. Être à part, il ne pouvait que se faire remarquer et Baker lui fait payer sa différence. Mais ce que Baker n'avait pas senti, c'est l'énergie rageuse qui habite cet homme. Sa vengeance sera inoubliable.

Et comment en vouloir à Kaltenbrunner de vouloir prendre sa revanche sur une bande d'alcooliques bigots et consanguins ? Tristan Egolf trace un portrait au vitriol de cette bourgade rurale. On imagine aisément qu'il s'agit de sa vengeance personnelle sur l'endroit où il a grandi. Un petit exemple des descriptions de Baker : « Année après année, le comté de Green se classe régulièrement parmi les cinq premiers du pays en terme de consommation d'alcool par habitant. Presque tout le monde à Baker boit en vertu d'une nécessité terrifiante. Un jeune homme peut difficilement se faire accepter parmi les adultes avant d'avoir plié au moins un pick-up autour d'un poteau téléphonique dans un état d'hébétude alcoolique. » Inévitablement, les fins de soirées se traduisent par des insultes, des bris de verre et des pommettes amochées. Une communauté pourrie jusqu'à la moelle, abrutie par l'alcool et la violence qui n'aura pas volé la leçon donnée par John Kaltenbrunner.

Son épopée ne serait pas la même sans la langue de Tristan Egolf. Celle-ci est imagée, puissante et crue. L'auteur utilise avec un humour redoutable les comparaisons et les analogies.

Je le redis, « le seigneur des porcheries » est un chef-d'oeuvre d'imagination, de création et d'écriture. Une fois le livre refermé, il est impossible d'oublier John Kaltenbrunner et l'ouragan qu'il déchaine sur sa communauté dépravée.
Lien : http://plaisirsacultiver.wor..
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