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Critique de leboncoinlecture


Ce texte date déjà de 1998… 24 ans… Au moment même où l'on redécouvrait officiellement, par dissection, l'entièreté de l'anatomie du clitoris, dont la première représentation complète date pourtant de 1558…
1998 : année où l'on commercialisait le Viagra… S'il était besoin d'une nouvelle preuve du gouffre abyssal dans la connaissance des sexes et des inégalités médicales au-delà de sexuelles entre les hommes et les femmes…

1998 a été une renaissance pour l'étude du clitoris, qui a connu depuis des avancées et une certaine publicité – mais le nombre d'études reste réduit et le financement des recherches plus que complexes - : IRM en 2005, échographie au repos en 2008 et en action en 2010, représentation en 3D en 2016, en 2017 un premier manuel scolaire de SVT de collège l'intègre aux planches anatomiques des organes sexuels féminins, 5 en 2019 pour les classes de Seconde – il y a moins de trois ans, vous avez bien compté.

Si l'on en croit Jean-Claude Piquard, auteur de «la fabuleuse histoire du clitoris » (2013), le clitoris a été progressivement diabolisé à partir de la fin du XIXème siècle, ayant compris que la substance qu'il émettait lors de l'orgasme n'était pour rien dans la fécondation, sa stimulation détournant dès lors (selon eux) du but principal (et Freud y a quelque peu mis du sien aussi, disant que la stimulation clitoridienne relevait de l'hystérie et de la sexualité adolescente...)… D'où, comme il est fait mention dans ces « Monologues du vagin », de la pénalisation de la masturbation féminine (!!!!) - la dernière ablation du clitoris (clitoridectomie si on veut faire médical, excision si on veut bien faire le lien avec le caractère de mutilation) pour cette raison aux Etats-Unis date de 1948 nous apprend-elle (!!!!), sa diabolisation ayant cours jusque dans les années 1960 (on en déduit l'influence sur les générations de femmes nées dans ces années-là ou dont les mères sont nées dans ces années-là) ; je n'ai pas souvenir de cette mention dans le roman datant de 1985 mais l'adaptation télévisuelle de « The Handmade's Tale » n'est pas loin – et son inspiration ne semble pas difficile à trouver...

Ayant cela en tête et dans notre ère encore fraiche de post #Me too, ce texte est d'une formidable actualité et conserve son pouvoir libérateur, déculpabilisant, sur le plan individuel, qui débarrasse de la honte injustifiée liée à ce qui est simplement un organe . « « vagin » n'est pas un mot pornographique ; c'est en fait un terme médical, un terme désignant une partie du corps, comme « coude », « main » ou « côte » » (préface). Ce terme désigne dans la pièce l'ensemble de l'organe sexuelle féminin et l'autrice explique le choix de ce terme, qui peut paraître réducteur, dans la préface.

Texte d'actualité et libérateur donc, mais je le trouve malgré tout assez soft et je pense qu'aujourd'hui, on irait encore plus loin. J'ai eu un goût de trop peu dans le côté revendicatif ou même simplement explicatif et démonstratif. Ceci dit, comme toujours avec un texte de théâtre, la dimension scénographique et du jeu d'actrice manquent (DVD de 2002 en rupture de stock et plus édité… Il semble qu'il soit tout de même mis en scène régulièrement – une lecture a même été faite en 2018 par des ministres françaises).

Pour autant, le texte, créé à partir de 200 entretiens, me semble mettre en avant la plupart des sujets et problématiques liées à ce thème - mais parfois de manière un peu rapide et allusive à mon goût : le silence, l'effacement, la méconnaissance de son vagin – j'y lis personnellement l'influence que cela a sur le fait de s'assumer en tant qu'individu, de marcher la tête haute ; l'amour, le désamour ou la honte pour cet organe et pourquoi, souvent lié au regard du ou de la partenaire en plus de celui inculqué par la famille et/ou la société ; les règles ; le viol, qu'il soit pulsionnel ou arme de guerre ; le plaisir (la liste des catégories de gémissements : excellent ! L'autrice en voit bien plus que ce que l'on peut imaginer ! ) ; l'accouchement (loin du lyrisme lié au don de la vie).

Même s'il me semble aujourd'hui ne pas aller assez loin, je pense que c'est une base fondamentale sans langue de bois dans l'acceptation de soi pour une femme, et dans l'approche du féminin pour un homme. Je ne peux que le recommander, quel que soit votre sexe.
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