Cher B,
Quoi qu'il arrive, mes sentiments resteront les mêmes.
A.
Si toujours n'existe pas, dit-elle, c'est nous qui l'inventerons.
Je crois que notre éducation nous amène à estimer que le bonheur est une chose qu’on nous a promise. Que nous méritons tous d’être heureux. Je pense que c’est la raison pour laquelle le sale merdier qui s’abat sur certains d’entre nous est si dur à accepter. Parce que nous sommes censés être heureux.
J'ai vu un tas de gens s'éteindre, tu sais, et chaque fois, leur entourage les suppliait de continuer à lutter. Il faut une force extraordinaire pour y parvenir, mais en effet, c'est généralement la bonne réaction : persévérer, s'accrocher, quoi qu'il advienne. Sauf que parfois, on oublie qu'il faut aussi de la force pour être capable de lâcher prise.
Je sais que c’est parfois un vrai combat d’être reconnu pour ses qualités personnelles, et non pour sa situation.
Peut-être que la provenance des cordelettes n'avait plus d'importance. Elles pouvaient bien tomber du ciel, arriver du fin fond de l'espace ou avoir remonté le temps depuis un lointain avenir, c'étaient les gens qui décidaient de ce qu'ils allaient en faire, à présent.
Hier soir, j'ai ressorti ma boîte pour la première fois depuis des mois. Je ne l'ai pas ouverte mais j'ai relu l'inscription gravée dessus. "A l'intérieur se trouve la mesure de votre vie".
Il est question, bien sûr, de ce que contient la boîte, la cordelette ; mais peut-être n'est-ce pas la seule mesure dont nous disposons. Peut-être des milliers d'autres moyens de mesurer notre vie - la qualité effective de notre vie - existent-ils en nous, plutôt qu'à l'intérieur d'une boîte.
Et en vertu de notre propre mesure, on peut encore être heureux.
On peut vivre.
on ne manifeste pas uniquement parce qu’on espère que ça déclenchera des changements. On manifeste pour rappeler aux autorités qu’on est nombreux. Et qu’ils ne peuvent pas nous ignorer.
Si toujours n'existe pas, dit-elle, c'est nous qui l'inventerons"
Bon sang, je voudrais bien pouvoir prendre une journée de congé. Sauf que tous les jours, je dois m'efforcer de ne pas avoir l'air trop en colère, trop menaçante ou ingrate parce que ça rejaillirait sur l'ensemble des Noirs, ou de ne pas avoir l'air trop sensible, trop idiote ou timorée parce que ça rejaillirait sur l'ensemble des femmes, et voilà que maintenant il ne faut pas que j'aie l'air instable, émotive ou violente parce que ça rejaillirait sur l'ensemble des courts-segments. C'est sans fin!