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Critique de Christophe_bj


Annie Ernaux nous raconte l'histoire d'amour qu'elle a vécue avec un homme de trente ans de moins qu'elle. ● Je n'ai pas aimé tous les livres d'Annie Ernaux que j'ai lus : si La Place, par exemple, m'a plu, je n'ai pas aimé La Femme gelée. ● On a pu qualifier son écriture de « blanche », je pense au contraire, en tout cas dans cet opuscule, qu'elle est très travaillée, pour arriver au dénuement le plus pur, « à l'os ». ● Je comprends qu'on puisse ne pas aimer ces phrases qui semblent dépourvues d'affect, même si à mon avis il faut les chercher dans la profondeur du texte, car son écriture est tout sauf superficielle. ● Il y a vraiment dans ce très court récit de très beaux moments d'écriture, comme « ce jeune homme, qui était dans la première fois des choses ». ● le mélange des époques provenant de son union avec un homme beaucoup plus jeune qu'elle, qui lui rappelle sa propre jeunesse, mais aussi évoque sa future mort, est très bien mis en lumière : par exemple « Il rendait le moment présent d'autant plus intense et poignant que nous le vivions comme du passé. » Elle revit avec lui sa jeunesse pauvre et « plouque », maintenant qu'elle est « bourge ». S'inverse ainsi le phénomène qu'elle a analysé dans tous ses livres antérieurs : c'est elle, la transfuge de classe, maintenant « bourge », qui est face au jeune pauvre qu'elle était avant sa mue. ● La thématique de l'inceste court également dans le livre, et il y a cette très belle phrase : « Je voudrais être à l'intérieur de toi et sortir de toi pour te ressembler ». ● L'autobiographie transforme l'auteur en être de fiction, ce qui, par un curieux mécanisme de va-et-vient entre réel et fiction, interfère dans sa vie : « La principale raison que j'avais de vouloir continuer cette histoire, c'est que celle-ci, d'une certaine manière, avait déjà eu lieu, que j'en étais le personnage de fiction. » Comme si la vie n'était vécue que pour être écrite, pour faire littérature. ● Une certaine jeunesse se trouve bien décrite et montre le fossé qui s'établit entre son jeune amant et l'auteur, qui, elle, s'est libérée et a échappé à sa classe sociale par le travail : « Il n'avait jamais voté, n'était pas inscrit sur les listes électorales. Il ne pensait pas qu'on puisse changer quoi que ce soit à la société, il lui suffisait de se glisser dans ses rouages et d'esquiver le travail en profitant des droits qu'elle accordait. C'était un jeune d'aujourd'hui, convaincu de « chacun sa merde ». le travail n'avait pour lui pas d'autre signification que celle d'une contrainte à laquelle il ne voulait pas se soumettre si d'autres façons de vivre étaient possibles. » ● L'utilisation des initiales pour le nom de son amant, « A. » et surtout pour la ville où elle a passé son enfance, « Y. » est assez agaçante, tout le monde sait que c'est Yvetot. Ces demi-cachotteries sont malvenues dans un récit où elle se veut sincère. ● En conclusion, j'ai aimé ce petit livre et je le conseille.
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