Citations sur Les jardins de Basra (26)
Tout se brouille dans son esprit. Elle n’a jamais vu
dans son fils unique qu’un enfant qui avait besoin d’être
choyé et guidé, parfois même sermonné s’il le fallait, ce
qui arrivait souvent, s’agissant surtout de son refus catégorique de se marier.
Elle comprenait à présent que la différence est
une chimère et que tout le monde suit à peu près dans le
même ordre les étapes d’un cycle universel. Mais à peine
s’abandonnait-elle à cette idée qu’elle se rappelait son fils
Hishâm et elle la repoussait aussitôt. Son fils unique ne
ressemblait qu’à lui-même, lointain, bizarre dans ses us et
comportement.
Ce fantôme, elle ne l’avait jamais vu. Elle en entendait
seulement parler dans les histoires des autres, qui noircissaient l’image de sa taille démesurée, du râlement de
son sanglot déchiré et de la fusion de sa silhouette grise à
l’opacité du brouillard.
Ses doigts fins et délicats tenaient
Le Grand Livre de l’interprétation des rêves attribué à l’imam Muhammad ibn Sîrîn, l’un de mes livres préférés. Machinalement, je m’approchai d’elle en souriant et l’interrogeai sur son livre, lui demandant la permission de jeter un coup d’œil à l’intérieur et elle accepta,stupéfaite.
Dans mon premier rêve, tout était normal. J’étais dans l’appartement de Minya, en train de m’attraper avec ma mère sur un sujet quelconque avant de quitter la maison en colère. Je descendais prudemment l’escalier glissant en faisant attention à la marche cassée et sortais par la porte en fer de l’immeuble qui ouvrait devant moi sur un espace inconnu.
J’étais et suis toujours fasciné par Jâhiz et le prêche de Wâsil ibn ‘Atâ’,qui bannit la lettre r, m’a captivé quand nous l’avons étudié en deuxième année de lycée. Mes camarades ont protesté quand le professeur de langue arabe nous a demandé de l’apprendre par cœur, sous prétexte de sa difficulté.
Quant à moi, je l’ai appris sans peine et de bonne grâce et, une fois retenu, je l’ai senti comme faisant partie de ma vie et de mon histoire.
Quand elle est contente de moi, elle me parle de sa beauté, du temps où elle était jeune. Elle aime se comparer à la lune et, de mon côté, je feins d’oublier son prénom, Layla, pour l’appeler “Qamr”. Elle sourit d’abord avec une satisfaction coupable, avant de me gronder pour des motifs principalement inventés.
Je nourris une passion particulière pour les œuvres perdues et m’intéresse aux auteurs de renommée universelle qui ont distrait les hommes une partie de leur vie,
puis dont les livres ont été détruits, brûlés ou perdus de sorte que nous n’en conservons que les titres, la biographie de leurs auteurs et quelques extraits repris dans d’autres ouvrages.
Je ne suis pas seulement un chercheur de livres précieux. J’étais et je reste un lecteur boulimique qui désire
en connaître le contenu avant de les vendre aux amateurs prêts à payer de grosses sommes pour les acquérir.
La précision est requise. Elle n’est pas un luxe. Elle est la voie qui mène au bonheur et au succès. Mais ce que je dis là, c’est prêcher dans le désert !