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Critique de MarcusMauss


À première vue ce roman iconique se présente comme un livre pour enfants. de petits chapitres introduits avec une brève explication sur ce qui va se produire dans ce chapitre. Mais il s'avère rapidement qu'on est bien dans un monde d'adultes, de surcroît à la veille d'un des pires moments de l'histoire européenne. Banlieue berlinoise, début des années 1930, il y a du Hitler dans l'air. Dans ce contexte très historique un jeune couple se voit confronté à quelque chose de plutôt universel chez les jeunes couples. La jeune fille se trouve enceinte sans trop l'avoir voulu, et le médecin qui lui annonce son état ne veut pas du tout y remédier. D'où mariage obligatoire et quelque centaines de pages de système d'pour trouver un logement, trouver du travail, accoucher de l'enfant et surtout résister aux tentatives humiliation des gens plus riches et plus puissants que nos deux tourtereaux. Ça aurait pu donner une histoire banale, mais Hans Fallada arrive à en faire quelque chose de super.
D'abord il arrive à nous faire éprouver une énorme sympathie pour le couple. Surtout pour Emma, la jeune maman issue d'un milieu ouvrier. En allemand son surnom est 'agnelette', et on craint bien la voir sacrifiée comme l'agneau pascal quand elle se trouve confrontée à une vie dure, pour laquelle elle n'est pas du tout préparée. Mais elle garde la tête haute et l'esprit optimiste. Pour son mari Johannes, qu'Emma n'appelle que 'môme', on aura peut-être plus d'empathie que de sympathie. Johannes est moins franc qu'Emma, étant pris entre famille et employeurs. C'est joliment symbolisé par son alliance bon marché qu'il cache à certains moments, ou justement montre ostensiblement quand il pense tirer profit d'un statut de célibataire ou d'homme marié vis à vis d'un employeur potentiel. Là où Emma rêve de jours meilleurs, Johannes prend conscience d'un quotidien mal parti. À la fin du livre il se lance dans une analyse pertinente de son époque, qui n'est finalement pas si différente de la nôtre: les riches et puissants s'amusent avec les petites gens avant de s'en débarrasser.
Autre atout de Fallada: une forme de tendresse ironique qu'il utilise pour décrire les autres personnages du roman. Par exemple un des premiers patron de Johannes, Kleinholz, qui essaie d'échapper au contrôle de son épouse pour aller danser et boire la nuit. Ou un collègue nazi qui se fait régulièrement tabasser par des groupes communistes quand il participe aux meetings des chemises brunes. Fallada touche à l'aspect humain trop humain du système, ce n'est pas beau à voir, mais ça rend presque compréhensibles certains comportements.
Pour moi le point le plus fort de Quoi de neuf, petit homme c'est le sentiment de recul avec lequel Fallada relate son histoire. À plusieurs moments j'ai eu dû mal à réaliser qu'il a écrit les événements quasiment au moment où ils sont censés se produire. Il était en quelque sorte en plein dedans, sans savoir ce qui allait suivre. Mais dans beaucoup de phrases on sent déjà le danger qui menace, comme un nuage sombre qui petit à petit va enlever la lumière de la scène.
Fallada a écrit d'autres romans, dont l'aussi iconique Seul à Berlin. Je ne vais probablement pas attendre encore vingt ans pour le lire.
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