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Critique de berni_29


Le braconnier de Dieu, c'est l'histoire de Grégoire Quatresous, dit « Vingt Centimes ». Jeune homme épris de coquineries, cherchant avec son ami Toussaint Baboulot à oublier de temps en temps les affres de l'Occupation dans les bras d'une femme généreuse dont le mari est prisonnier, c'est un soir de 1943 en revenant de chez la mère Françoise que son destin va prendre une tournure inouïe. Pour échapper à une patrouille allemande qui traque les deux compères, il ne doit la vie sauve qu'en trouvant refuge auprès de moines Trappistes. C'est comme cela qu'il va devenir Frère Grégoire à l'abbaye Notre-Dame de Sept-Fons.
Vingt-six années consacrées à la dévotion et à la communauté de ses frères moines... Et puis un dimanche de juin...
« Ce fut en allant voter Pompidou que Frère Grégoire rencontra le péché. » C'est d'ailleurs ainsi que commence ce récit savoureux de René Fallet. Tout est annoncé dans cet incipit jouissif à souhait...
Ce dimanche matin-là, le chemin de Frère Grégoire va rencontrer celui de Muscade, belle et voluptueuse marinière dont la péniche est amarrée sur la berge du canal du Nivernais. Non, je vous assure qu'il n'y a pas de contrepèterie dans cette phrase...
C'est un dimanche matin de juin qui sent l'odeur enivrante des pistils, l'école buissonnière et le pastis...
Muscade, c'est la jolie fleur rouge d'une bouche, c'est un pépin qui se glisse dans le fruit défendu, quelque chose de trouble et de féminin. C'est un rire gorgé d'impudeur et de jaja, c'est le bleu du ciel qui se retourne, c'est la java dans tous ses états...
Quand le vin de messe est tiré, il faut le boire !
Frère Grégoire ne s'en remet pas, certaines mauvaises langues diront que, s'en retournant à l'abbaye après cela, au bureau de vote, se saisissant d'un seul bulletin, il aurait même voté communiste...
Je vais vous faire une confession : ce court roman m'a fait un bien fou. C'est une ode à l'incivilité, à la chopine et à l'amour. Chaque page se boit comme un verre de Saint-Pourçain.
C'est l'aventure au bord du zinc, c'est le soleil dans les verres, c'est la joie au balcon à gorges déployées...
C'est follement drôle et c'est fin en même temps, jamais vulgaire, fin de poésie... Poésie champêtre, rurale, poésie de la fraternité et de l'amour...
Chaque phrase se boit comme du petit lait. « C'est le petit Jésus en culotte de flanelle ! »
Drôle, léger oui... Mais ne vous y trompez pas, derrière l'allure d'une farce paillarde et anticléricale, derrière la langue truculente de René Fallet, se cache aussi une fable inspirée qui fait l'éloge de la liberté et de la joie de vivre.
Apôtre de l'esprit libre, René Fallet nous invite, en fustigeant la religion, à revisiter la notion du péché et à nous éprendre de la vie telle qu'elle vient, avec ses gourmandises et ses chemins de traverses...
Et Dieu dans tout ça ?
Dieu ? Il s'en sort plutôt bien merci pour lui, dépoussiéré, réhabilité, remis au coeur de la vie...
Le braconnier de Dieu, c'est un orgasme bucolique, oenologique, fraternel, littéraire...
Le miracle de ce petit livre sans prétention est que chaque page est un éveil des sens.
Un roman à déguster sans modération...
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