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Critique de Marie987654321


Le petit rhinocéros d'or qui donne son titre à l'ouvrage est un objet de 14 cm retrouvé à Mapungubwe, site archéologique sud-africain à la frontière du Botswana et du Zimbabwe dont l'occupation remonte au Xe – XIIIe siècle. Avec lui furent trouvés des centaines d'objets comme des perles de verre fabriquées en Inde ou des fragments de céramiques « céladon » de la dynastie Song, témoignant de l'insertion de ce lieu dans un réseau d'échanges internationaux. Encore mieux, le petit rhinocéros n'a qu'une corne alors que les rhinocéros africains en ont deux… pourtant l'or qui le recouvre vient de la région, ce n'est donc pas un objet importé... mais pourquoi n'a t'il qu'une corne?
Pendant longtemps, vu d'Europe, l'Afrique noire, n'avait pas d'histoire faute de l'avoir écrite. Elle était le pays d'où venait l'or au Moyen-âge, peuplée de bêtes sauvages et d'hommes à la peau brune. le poids des représentations a longtemps freiné la recherche. Ainsi, le site sud africain a été découvert au début du XX eme mais il n'était pas envisageable qu'il s'agisse de la trace d'une cité africaine noire puissante. Les mines d'or abandonnées du plateau du Zimbabwe (connues au XIXe) pouvaient être les mines légendaires du roi Salomon mais pas les vestiges d'une économie florissante africaine.

Il existe des sources écrites même ténues : récits de voyageurs arabes ou juifs, lettres liées au commerce ou même le récit d'un voyageur chinois du VIIIe siècle. Il existe aussi des sources archéologiques comme le site de Mapungubwe, de Zimbabwe, du plateau éthiopien ou du Sahel ou encore les trouvailles de Théodore Monod dans le Sahara.
Mais il est vrai qu'elles sont fragmentaires, trop peu nombreuses pour être recoupées et fiabilisées. Les sites ont souvent été fouillés pour retrouver des trésors sans les précautions d'usage des archéologues sur les strates et la documentation à produire, comme ce fut le cas pour le petit rhinocéros à une seule corne. D'autres n'ont pas (encore ?) été retrouvés. Il faut donc faire avec pour interpréter.

Malgré tout, les traces sont suffisantes pour donner l'idée d'un monde riche, relié aux circuits commerciaux et doté de structures sociales et politiques complexes. L'auteur parle d'un âge d'or africain. L'Afrique noire du Moyen Age est à l'extrémité d'un réseau commercial dense entre l'Asie, le monde musulman et le monde méditerranéen. du coeur de l'Afrique vient notamment l'or et les esclaves en échange, entre autre, de chevaux et de sel (qui fait cruellement défaut). Les grands royaumes sahéliens (Ghâna, Mâli..) font leur fortune et leur pouvoir grâce à leur position au Sud du Sahara au débouché des grandes caravanes entre le monde musulman et les gisements aurifères encore plus au sud pour l'essentiel. En ce temps-là, c'est notre petite Europe qui était un monde périphérique.

Les routes commerciales changent au cours de la période considérée entre le VIIIe et XVe siècle, faisant des gagnants et des perdants. Il y a bien une histoire avec des centres qui apparaissent et disparaissent. Tout change vraiment au XVe et XVI eme siècle, lorsque les portugais établissent des comptoirs en Afrique pour commercer directement avec les peuples Noirs et que Vasco de Gama réussit à rejoindre l'Inde par la mer, réduisant l'intérêt du passage par les commerçants musulmans. En même temps, la découverte de l'Amérique et de ses réserves d'or va probablement mettre un coup d'arrêt à la prospérité africaine avant que l'accélération du commerce des esclaves n'aggrave encore les choses.
C'est toute cette vie que ce recueil nous fait découvrir à partir de lettres de marchands, du récit d'un voyageur chinois, d'une inscription gravée sur une stèle, d'un atlas ancien… Les chapitres sont courts, se lisent avec plaisir et, malgré les limites de nos connaissances, nous transportent dans ce monde inconnu et fascinant.
Une lecture passionnante.
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