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Critique de Laureneb


En rattrapant des podcasts en retard cet été, j'avais entendu François-Xavier Fauvelle sur France Culture, et je l'avais trouvé à la fois passionnant, pédagogique et même drôle, ce qui m'a donné envie de lire cet ouvrage.
D'abord, il y a évidemment l'intérêt et le plaisir de découvrir une histoire encore trop largement inconnue chez nous, le Moyen-Âge africain – de l'Afrique saharienne et subsaharienne, en-dehors des interventions occidentales. Cependant, si les Européens ignorent l'intérieur du continent, c'est un continent connecté, une partie de l'histoire globale, qui participent à des échanges reliant au moins trois mondes : le monde subsaharien avec ses mines de sel, ses esclaves, et surtout ses réserves d'or, le Maghreb et la péninsule arabique, c'est-à-dire le monde musulman, et le monde asiatique et indien. Les échanges sont multiples, économiques, religieux, culturels, scientifiques... J'ai bien aimé justement la façon d'écrire de l'auteur : ne pouvant nous livre un tableau global, ce qui serait à la fois impossible du fait du manque de sources, trop complexe et en même temps plein de vides, il choisit de se focaliser sur des moments, des personnages, des lieux, révélateurs ou exceptionnels, mais qui marquent des évolutions, des transformations progressives du continent : urbanisation, structuration et concentration politique avec l'émergence de grands royaumes, conversion à l'islam, commerce des esclaves, exploitation du sel, mines d'or, minorités chrétiennes, art et artisanat, trésors... Si je connaissais Mansa Mousa, l'homme dit le plus riche de l'histoire, j'ai ainsi pu le replacer dans son contexte.
Ensuite, il y a dans l'écriture un certain détachement, et même de l'humour, ce qui est rare dans un ouvrage d'histoire scientifique. Je pense notamment aux titres des chapitres, avec des allusions à des titres de films - « pour quarante deux mille dinars » par exemple. Certains chapitres pourraient faire penser à des scénarios de série, comme « l'affaire de la concubine », avec sexe, trahison, complot, peuples différents... Digne de Game of thrones ! Cet humour dans l'écriture vient donc d'une complicité tissée par l'écriture entre le chercheur et son lecteur, François-Xavier Fauvelle nous tient par la main pour nous introduire dans son monde, mais avec modestie et recul. Je trouve cela intéressant, rafraîchissant même alors que sur les plateaux de télévision n'importe qui s'improvise expert en n'importe quoi, de dire qu'on ne sait pas, qu'on n'est pas sûr, qu'il manque des informations. Par nature, les sources sont lacunaires pour écrire l'histoire de l'Afrique, il manque des informations, certaines dates ne sont pas sûres, les localisations incertaines, il y a des doutes sur certains personnages... François-Xavier Fauvelle l'assume, il ne peut détenir la vérité absolue, dans la mesure où il y a trop de zones d'ombres, il expose donc sa démarche de chercheur, partir de ses doutes pour établir des hypothèses, valables en l'état de la documentation qui pourront être aménagées, voire bouleversées, face à d'autres sources. En tant que lecteur, cela nous fait participer au travail de l'historien et de l'archéologue, la vérité ne vient pas de nulle part, elle se cherche et se construit.
Une oeuvre stimulante, intéressante, qui apprend de nombreuses choses et qui donne envie d'en savoir plus et d'approfondir, avec en plus une écriture agréable.
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